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Congo-belge : L’épineuse question de l’esclavage

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En 1889, Léopold II fait un testament léguant le Congo à la Belgique. Mais comme en Belgique rien n’est jamais simple, ce legs nécessite une révision de la Constitution afin d’y inclure l’acquisition de colonies, protectorats ou autres possessions d’outre-mer.

Lorsqu’une première proposition d’annexion est déposée à la Chambre, elle provoque une discussion longue et passionnée. Le projet est rejeté.

Froissé par les objections et les critiques soulevées au Parlement, Léopold II décide de ne plus encourager davantage le gouvernement. Mais, pressé par d’impérieux besoins d’argent pour sauver son œuvre, il en arrive à restreindre la liberté commerciale imposée par l’Acte de Berlin en divisant son territoire en domaines et fondations :

  • L’Etat se déclare propriétaire de toutes les terres vacantes, ce qui lui donne le monopole des 2 principales richesses du moment : l’ivoire et surtout le caoutchouc dont l’importance économique s’accroît brusquement.
  • Ailleurs, l’Etat octroie de larges concessions à des sociétés privées en y conservant de puissants intérêts
  • Des « Fondations de la Couronne » sont créées. Leurs revenus vont permettre la création du musée de Tervuren ainsi que l’accomplissement d’une série de travaux d’utilité publique de caractère somptuaire, au Congo et en Belgique.
  • Les indigènes sont tenus, par un système de corvées, à fournir d’importantes quantités de caoutchouc et de défenses d’éléphants
  • Des agents locaux trop zélés, des chefs indigènes cupides punissent les réfractaires par des incendies de villages, des captures d’otages et des châtiments corporels.

 Le système, devenu générateur d’abus, ne tarde pas à provoquer des réactions violentes en Belgique et à l’étranger. C’est ainsi que deux Britanniques libéraux décident de mobiliser l’opinion internationale en lançant de vastes campagnes de calomnies et des attaques si virulentes contre Léopold II que celui-ci se voit contraint d’envoyer une commission d’enquête internationale au Congo. Il apparaît alors que cette campagne de diffamation étrangère, quoique dénonçant à juste titre certains abus du système domanial, dissimule en fait un appétit des plus dangereux pour l’avenir de la colonie belge. Par ailleurs, le risque est réel de voir les Etats-Unis rejoindre l’attitude désapprobatrice de l’Angleterre à l’égard du roi des Belges.

 

 

Congo-belge : L’épineuse question de l’esclavage

 

 

Le 16/03/2019

 

 

Liste des chapitres :

- L'ambition de Léopold II
- Les choses se mettent en place
- Des frontières à fixer ...
... et un Etat à faire fonctionner
- L'épineuse question de l'esclavage
- La Belgique devient une puissance coloniale
- Les étapes de la mise en valeur du Congo
- Vers l'indépendance

 

L’ambition de Léopold II

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Déjà avant son accession au trône, Léopold II pressent tout l’avantage qu’il pourrait y avoir pour la Belgique à prendre pied en Afrique avant que l’appétit des grandes puissances voisines ne se déchaîne. La tâche sera délicate car il s’agit de ne pas éveiller les soupçons.

Alors que Léopold II réfléchit et élabore des plans, un certain Henry Stanley, journaliste américain d’origine anglaise, part à la recherche d’un missionnaire anglais David Livingstone dont on était sans nouvelles depuis qu’il était parti explorer le cours supérieur du fleuve Congo. En 1871, après plus de 8 mois de caravane et d’aventures périlleuses, la mission est accomplie, les deux hommes se présentent l’un à l’autre et voyagent ensemble pendant 28 jours.

Léopold II trouve dans les articles de Stanley la confirmation de ses aspirations colonisatrices et estime qu’il est temps de mettre ses projets à exécution.

  • Le 12 septembre 1876, il réunit à Bruxelles une Conférence internationale de Géographie réunissant des savants et des explorateurs. La Conférence se fixe comme objectif de rechercher la méthode la plus favorable à l’accès de la civilisation en Afrique afin d’ouvrir ce continent au commerce et d’y lutter contre le trafic des esclaves. Au terme de 4 jours de débats, les participants décident de confier à un nouvel organisme, l’Association Internationale Africaine (AIA), la mise en œuvre de leurs conclusions.
  • Aussitôt, divers comités nationaux se mettent au travail avec, bien sûr, des arrière-pensées politiques. Le comité belge organise pour sa part 5 expéditions qui se heurtent à de grandes difficultés.
     
Association Internationale Africaine
L’Association Internationale Africaine


Au retour de Stanley d’une nouvelle expédition en Afrique, Léopold II l’invite à rejoindre l’AIA. Stanley, préférant chercher des appuis dans les milieux commerciaux et politiques britanniques, refuse l’offre du roi. Toutefois, après 6 mois de démarches vaines en Angleterre où il ne rencontre que scepticisme et méfiance, il se résout à reprendre contact avec le palais royal de Bruxelles. Il signe 2 contrats :

  • Un contrat de 5 ans avec le roi
  • Un contrat de 2 ans avec un organisme nouveau, exclusivement belge, le Comité d’Etudes du Haut-Congo.

De 1879 à 1884, Stanley, aidé d’un groupe de pionniers parmi lesquels figurent de nombreux Belges, va explorer méthodiquement la région du Congo inférieur. A cet effet, une petite flottille de 5 steamers démontables, battant pavillon azur étoilé d’or, part de Banana le 31 août 1879.

Les résultats des opérations sont très satisfaisants. En 5 ans :

  • 30 postes sont fondés, dont celui de Léopoldville (future Kinshasa)
  • Une route est tracée afin de permettre l’acheminement à dos d’hommes, des pièces détachées des steamers qui seront mis à l’eau à Léopoldville à l’endroit où le fleuve devient navigable
  • Pendant l’exploration du pays, plus de 500 traités sont signés avec des chefs indigènes. Il s’agit de traités de suzeraineté et de commerce qui accordent le droit d’occuper le pays et d’y planter le drapeau bleu étoilé d’or.

Toute cette œuvre est menée avec discrétion et rapidité car :

  • Les Français ont chargé un explorateur, Savorgnan de Brazza, de marcher vers le Congo inférieur, par le Nord-Ouest
  • Les Portugais, appuyés par l’Angleterre, font valoir sur le Congo inférieur des droits historiques périmés.

 

Les choses se mettent en place

En 1882, Léopold II juge le moment venu de prendre position au point de vue politique. Il substitue au Comité d’Etudes du Haut-Congo une Association Internationale du Congo (AIC) dont il est le dirigeant et sous le couvert de laquelle il peut plus facilement accepter le bénéfice des traités conclus avec les chefs locaux. Il cherche ensuite à faire reconnaître ses droits par les puissances étrangères. Son calcul diplomatique est habile !

  • Le 22 avril 1884, les Etats-Unis reconnaissent les premiers l’AIC comme autorité gouvernementale
  • Léopold II amène la France à réduire ses prétentions sur le Stanley Pool en lui octroyant un droit de préférence pour la reprise des territoires de l’AIC au cas où celle-ci en envisagerait la cession.
  • Le 8 novembre 1884, l’Allemagne signe à son tour une convention avec l’AIC
  • Pour dissuader l’Angleterre de soutenir trop chaleureusement les prétentions portugaises sur l’embouchure du fleuve Congo, Léopold II menace d’en informer la France et l’Allemagne.
  • Le roi utilise, en outre, le mouvement de sympathie suscité aux Etats-Unis par la lutte contre les marchands arabes d’esclaves.

L’existence du Congo est donc largement admise lorsque débute, le 15 novembre 1884, la grande Conférence de Berlin convoquée à l’initiative du chancelier Bismarck et à laquelle assistent les délégués de 14 Etats. Elle a pour objectif de s’occuper du partage de l’Afrique centrale au profit des nations européennes.

La Conférence de Berlin subordonne la reconnaissance d’un Etat indépendant du Congo à un certain nombre de conditions :

  • La liberté du commerce et de la navigation dans le bassin du Congo
  • La liberté d’établissement
  • La protection des indigènes
  • La liberté de conscience
  • L’interdiction de l’esclavage et de la traite des êtres humains
  • La neutralité perpétuelle mais non garantie.

Le 23 février 1885, la Belgique adhère à ces conditions. Léopold II en devient le chef à titre personnel. Il est maintenant libre de réaliser ses vastes projets.

 

Des frontières à fixer …

L’acte de Berlin ne précise cependant pas les frontières du nouvel Etat indépendant. Il convient donc de hâter la reconnaissance des affluents du fleuve Congo et de conquérir rapidement le territoire le plus grand possible.

La délimitation des frontières fait l’objet de missions exploratoires difficiles et de négociations parfois épineuses. Encore une fois, le roi manœuvre de sorte à éveiller les suspicions des grandes puissances les unes envers les autres et à leur faire préférer, par la suite, des solutions « léopoldiennes ».

Les frontières définitives de l’Etat du Congo sont finalement fixées :

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Frontières du Congo Source : Histoire de la Belgique en mots et en images

 

 

  • En 1891, au Sud (Angola), en accord avec le Portugal
  • En 1894, au Sud-Est (Rhodésie) en accord avec l’Angleterre
  • En 1894, au Nord (rive gauche des rivières Oubangui et Mbomu jusqu’à la ligne Nil-Uele) en accord avec la France
  • En 1906, au Nord-Est (ligne ferrée de faîte Congo-Nil) en accord avec l’Angleterre
  • En 1910, à l’Est (Tanganyika) en accord avec l’Allemagne.

Le Congo, situé à 5.000 km de la métropole, s’inscrit ainsi dans un « carré »

  • de 2.050 km du Nord au Sud
  • de 1.930 km d’Est en Ouest
  • couvrant 2.380.000 km2, soit une superficie 80 fois supérieure à celle de la Belgique.
  • peuplé de 10 à 15 millions d’habitants.

 

… Et un Etat à faire fonctionner

A l’époque, la Belgique n’a aucune responsabilité dans l’Etat du Congo. Le roi Léopold II, souverain aux droits limités par la Constitution en Belgique, devient, paradoxalement, un monarque absolu au Congo. Il peut y mener une politique congolaise en toute indépendance.

Le souverain se met immédiatement à l’œuvre et peut compter sur la collaboration de beaucoup de Belges pour l’assister dans l’administration de ce grand territoire.

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  • Le gouvernement central est fixé à Bruxelles. Il comprend :
    • Un secrétaire d’Etat
    • Les directions générales :
      • Des Affaires Etrangères
      • Des Finances
      • De l’Intérieur
  • Le gouvernement local, établi à Boma. Il comprend :
    • Le gouverneur général
    • Des districts régis par :
      • des directeurs
      • des inspecteurs

 

L’épineuse question de l’esclavage

L’occupation du Congo se fait en général de manière pacifique. La population de race bantoue, nigritienne (soudanaise), nubienne ou négrille, est de mœurs relativement douces et accueillantes. Il en va tout autrement dans la partie orientale, située entre le Haut-Congo et le Tanganyika, où habitent des Arabes zanzibarites grands trafiquants d’esclaves.

Afin de mieux remplir les devoirs que lui imposait l’Acte de Berlin, Léopold II convoque à Bruxelles, en 1889, une Conférence antiesclavagiste. Cette réunion internationale élabore un système général de répression du trafic des esclaves (Acte de Bruxelles du 2 juillet 1890).

C’est à cette même époque que les hostilités s’engagent entre les postes avancés de l’Etat et les chasseurs d’esclaves. Il devient donc urgent de prendre des mesures énergiques, mais les difficultés matérielles sont énormes : des forêts, des marécages, des brousses offrent des avantages considérables à un adversaire nombreux et bien armé. La campagne antiesclavagiste finit par triompher et ce, malgré les nombreux massacres infligés aux Belges.

Esclaves maltraités

Cortège d’esclaves maltraités

Chronologie de la Belgique de 1830 à nos jours, p. 104

En 1889, Léopold II fait un testament léguant le Congo à la Belgique. Mais comme en Belgique rien n’est jamais simple, ce legs nécessite une révision de la Constitution afin d’y inclure l’acquisition de colonies, protectorats ou autres possessions d’outre-mer.

Lorsqu’une première proposition d’annexion est déposée à la Chambre, elle provoque une discussion longue et passionnée. Le projet est rejeté.

Froissé par les objections et les critiques soulevées au Parlement, Léopold II décide de ne plus encourager davantage le gouvernement. Mais, pressé par d’impérieux besoins d’argent pour sauver son œuvre, il en arrive à restreindre la liberté commerciale imposée par l’Acte de Berlin en divisant son territoire en domaines et fondations :

  • L’Etat se déclare propriétaire de toutes les terres vacantes, ce qui lui donne le monopole des 2 principales richesses du moment : l’ivoire et surtout le caoutchouc dont l’importance économique s’accroît brusquement.
  • Ailleurs, l’Etat octroie de larges concessions à des sociétés privées en y conservant de puissants intérêts
  • Des « Fondations de la Couronne » sont créées. Leurs revenus vont permettre la création du musée de Tervuren ainsi que l’accomplissement d’une série de travaux d’utilité publique de caractère somptuaire, au Congo et en Belgique.
  • Les indigènes sont tenus, par un système de corvées, à fournir d’importantes quantités de caoutchouc et de défenses d’éléphants
  • Des agents locaux trop zélés, des chefs indigènes cupides punissent les réfractaires par des incendies de villages, des captures d’otages et des châtiments corporels.
     
L'ivoire Récolte du caoutchouc
L’ivoire  
Source : Wikipedia 
Récolte du caoutchouc 


Le système, devenu générateur d’abus, ne tarde pas à provoquer des réactions violentes en Belgique et à l’étranger. C’est ainsi que deux Britanniques libéraux décident de mobiliser l’opinion internationale en lançant de vastes campagnes de calomnies et des attaques si virulentes contre Léopold II que celui-ci se voit contraint d’envoyer une commission d’enquête internationale au Congo. Il apparaît alors que cette campagne de diffamation étrangère, quoique dénonçant à juste titre certains abus du système domanial, dissimule en fait un appétit des plus dangereux pour l’avenir de la colonie belge. Par ailleurs, le risque est réel de voir les Etats-Unis rejoindre l’attitude désapprobatrice de l’Angleterre à l’égard du roi des Belges.

L’annexion du Congo par la Belgique devient dès lors une nécessité impérieuse. Mais Léopold II ne montre plus autant de hâte à se séparer de son œuvre.

 

La Belgique devient une puissance coloniale

La campagne de dénigrement ne tarda pas à compromettre gravement la situation diplomatique de l’Etat Indépendant du Congo. Pour sauver l’œuvre du roi, les Chambres votent la reprise du Congo par la Belgique le 20 août 1908 et, le 15 novembre l’annexion est opérée de manière solennelle.

 

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Acte de cession du Congo à la Belgique. Source : Chronologie de la Belgique de 1830 à nos jours, p. 108

 

Organisation politique

La Belgique hérite donc d’une colonie où elle devra redresser une situation chaotique en supprimant :

  • Le régime domanial
  • Le travail forcé
  • La Fondation de la Couronne

Elle administre la colonie de manière classique.

En Belgique

  • Le ministère est augmenté d’un département des Colonies
  • Un Conseil colonial est composé de 14 membres.

Une charte coloniale spécifie que le Conseil colonial déposera ses projets de loi sur le bureau de la Chambre. S’ils ne provoquent pas d’observations, ils acquièrent force de loi au bout d’un certain temps.

  • Le pouvoir législatif  est dévolu au roi :
    • sur proposition du Ministre des Colonies, il prend les décrets.
    • Le Parlement belge vote le budget et contrôle les adjudications des travaux publics.
  • Le pouvoir exécutif  est exercé par :
    • Le roi
    • Le Ministre des Colonies
    • Le gouverneur général qui séjourne au Congo
  • Le pouvoir judiciaire appartient aux tribunaux et cours d’appel composés uniquement de Blancs. Des tribunaux indigènes jugent les infractions légères et les contestations survenues entre les Noirs.

Au Congo, le gouvernement local comprend :

  • Un gouverneur général
  • Des gouverneurs de vastes provinces
  • Des commissaires généraux
  • Des commissaires de district
  • Des administrateurs territoriaux
  • Des agents

La population indigène

Elle conserve ses chefs qui veillent au respect des coutumes locales et au droit de libre récolte.

Le nouveau régime mis en place améliore considérablement les conditions de travail des Noirs et met fin aux campagnes de presse.

 

Les agents de l’œuvre civilisatrice

Les hommes chargés de civiliser le centre de l’Afrique appartiennent à 3 catégories :

  • Les officiers
  • Les fonctionnaires et les médecins
  • Les missionnaires

Les officiers

Les stations militaires parsemées dans la brousse encouragent rapidement les indigènes à venir y chercher aide et protection.

Les fonctionnaires et les médecins

  • Recrutés au début d’une manière parfois empirique, les fonctionnaires sont en général des éléments de grande valeur. En 1920, leur formation sera prise en charge par l’Ecole Coloniale Supérieure d’Anvers qui deviendra successivement l’Université Coloniale (1923) et l’Institut Universitaire des Territoires d’Outre Mer (1949)
  • Les médecins, de leur côté, ont la faculté de se préparer aux spécialisations africaines dans divers centres, notamment à l’Institut de Médecine Tropicale à Anvers.

Les missionnaires

En Belgique, les ordres religieux ont toujours été portés vers l’apostolat des missions. Dès le début, les Pères Blancs, les Pères de Scheut, les Pères Jésuites, les Frères de la Charité ainsi que de nombreux ordres féminins se sont embarqués pour l’Etat du Congo. Tous ces agents de la colonisation se sont trouvés en présence de populations bien douées mais craintives, pourchassées jadis par des tribus guerrières et encore traquées par des marchands d’esclaves. Périodiquement, elles sont décimées par la famine ou par des épidémies.

Sur place, il a fallu affronter les grands maux de la race africaine :

  • Le fétichisme
  • Les mutilations
  • L’ivresse provoquée par les fumées du chanvre
  • La maladie du sommeil
  • La tuberculose
  • La malaria
  • La variole
  • La lèpre

 

Les étapes de la mise en valeur du Congo

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Carte du Congo Belge. Cartes géographiques du Congo Belge et du Ruanda-Urundi, p. 1

En vue de lier étroitement le Congo à la vie économique du royaume, la Belgique et d’importantes sociétés capitalistes vont y investir d’importants capitaux.

 

L’infrastructure

Elle est surtout l’affaire de l’Etat belge qui va financer, dans une large mesure, les travaux d’infrastructure qui s’imposent.

 

Les voies navigables

Le fleuve Congo et ses grands affluents forment un ensemble de voies navigables de plus de 12.000 km. Très tôt, ces voies sont sillonnées de steamers rapides (bateaux à vapeur). De Léopoldville à Stanleyville, le bief navigable du fleuve forme un arc de cercle de 1.730 km

Mais le fleuve comprend également des secteurs impropres à la navigation séparant les longs biefs navigables. Il a donc été nécessaire de suppléer à ces déficiences afin de relier les différentes régions productrices séparées par d’immenses régions de forêts désertiques. Ce sera l’œuvre du chemin de fer.

 

Le réseau ferroviaire

Lorsque les pionniers coloniaux devaient remonter l’estuaire du fleuve Congo, ils arrivaient devant la barrière côtière des Monts de Cristal. Afin de relier Matadi à Léopoldville, un chemin de fer de 400 km fut construit et inauguré en 1898. Sa mise en œuvre avait duré 8 ans et s’était effectuée sous des conditions climatiques intenses, à une époque où les notions de l’hygiène coloniale n’avaient pas encore été identifiées. Les travaux coûtèrent la vie à 132 européens et à 1.800 indigènes.

Afin de contourner l’obstacle des Stanley Falls (une suite de 78 cataractes se succédant sur près de 100 km), une voie ferrée réunit Stanleyville à Ponthierville par une ligne de 125 km construite en 1906 et 1908.

 

Après l’annexion du Congo, le réseau ferré intérieur est encore amplifié :

  • En amont de Ponthierville, la ligne Kindu à Kabalo permet d’éviter une nouvelle série de rapides
  • De Kabalo, une voie transversale aboutit au Lac Tanganyika à Albertville
  • Une ligne à voie étroite entre Boma et Tshela permet d’amener au fleuve Congo les richesses végétales du Mayumbé
  • La découverte des richesses minières du Katanga fait ensuite surgir un tout nouveau programme (voir plus loin “Importance du Katanga”)

Les routes

La naissance progressive de grands centres de peuplement exige la construction de routes et l’achèvement de communications interrégionales aisées pour amener de la nourriture au peuple indigène : maïs, manioc, patates douces, etc.

Les richesses naturelles

La colonie cessa bientôt d’être considérée seulement comme utile pour la production de l’ivoire et du caoutchouc. D’ailleurs, à la veille de la Deuxième Guerre mondiale, la production du caoutchouc avait déjà considérablement diminué.

L’agriculture

 

Domestication des éléphants

Dès la fin du 19e siècle, l’espoir naît de multiplier, dans les savanes et les forêts, de vastes cultures rémunératrices :

  • Léopold II crée une station de domestication des éléphants d’Afrique
  • On encourage les indigènes pour la culture et l’élevage
  • La culture de la noix de palme, la production de l’huile de palme et l’exploitation des bois précieux sont bénéfiques à l’exportation
  • Après de longs et pénibles efforts, la production du sucre et du café sont devenues très rentables

A l’époque, les opinions divergent encore sur la question de savoir si l’agriculture du Congo devait prendre la forme :

  • De cultures de type moyen à confier aux indigènes
  • Ou, au contraire, celle d’exploitations plus vastes à laisser aux seules mains des immigrés blancs.

Quoi qu’il en soit, la mise en valeur du sol par les Blancs reçoit déjà un appui précieux sous la forme de la création d’une société de Crédit du Colonat (1947)

Les mines

Lorsque les prospections font connaître les ressources du sous-sol de la colonie, sa richesse prodigieuse ne fait aucun doute. Pour les exploiter, Léopold II fonde 3 sociétés très puissantes :

  • L’Union  Minière du Haut-Katanga dont la mission principale est d’assurer la mise en valeur des richesses du sol et du sous sol katangais
  • La Compagnie des Chemins de Fer du Bas-Congo au Katanga (BCK)
  • La Société Forestière et Minière du Congo (la Forminière) qui exploite principalement le diamant, les mines d’or et d’argent.
     
Union Minière Forminière
L’Union Minière  
Source : Wikipedia 
Part sociale de la Forminière 


Par la suite, d’autres groupements voient le jour comme, par exemple, la Géomines (Compagnie Géologique et minière) qui centralise l’extraction de la cassitérite (oxyde d’étain naturel) sur le Haut-Lualaba

 

L’importance du Katanga

Dès le départ, le Katanga prend un développement remarquable et son chef-lieu Elisabethville, situé à 1.300 m d’altitude, dépasse en importance la plupart des villes de l’Afrique centrale.

  • Le Katanga est le quatrième centre de production mondiale du cuivre. Jadotville, au Nord-Ouest d’Elisabethville, devient la « capitale du cuivre ».
  • On découvre au Katanga des quantités de minerais radioactifs (cobalt et minerai uranifère), ce qui permet d’estimer que le Congo possède le quart des réserves mondiales d’uranium
  • Toutes les usines de la région sont alimentées en énergie par les chutes de la Lufira, captées par la puissante centrale hydro-électrique de la Sogefor.

 

Extension du réseau ferroviaire

Le problème du transport des produits miniers du Katanga transforme la carte du Congo.

  • En 1928, un long tronçon de plus de 1.000 km rattache Elisabethville à Port-Francqui (Moyen Kasaï)
  • Depuis 1931, une voie part de Tenke (entre Jadotville et Bukama) et se dirige vers l’Ouest, entre dans la colonie portugaise de l’Angola et aboutit finalement à l’océan Atlantique
  • Au Sud, le Katanga se rattache aux lignes de la Rhodésie et du Cap.

Chemin de fer au Katanga

Chemin de fer au Katanga

Source : La Patrie belge, 1830-1930, p. 490

 

Vers l’indépendance

Si les Belges acceptent de faire participer les Africains à la gestion des affaires locales, ils sont cependant plus réticents à former des élites susceptibles d’exercer des droits politiques. Et, de fait, le système éducatif a été minutieusement canalisé dans ce sens :

  • Les missions sont chargées d’instruire et d’évangéliser dans le cadre d’écoles primaires et de séminaires
  • Le premier enseignement secondaire laïc accessible aux indigènes n’est créé qu’en 1954
  • C’est aussi en 1954 que s’ouvre la première université catholique à Lovanium près de Léopoldville
  • Et, 2 ans plus tard, la première université d’Etat sera ouverte à Elisabethville.

Jusqu’en 1958, le calme règne dans la colonie belge en pleine expansion économique.

Mais soudain, un mouvement nationaliste émerge et ne tarde pas à se radicaliser : le Mouvement National Congolais, dirigé par Patrice Lumumba, réclame la libération du peuple congolais. A l’instar de ce qui se passe dans plusieurs pays africains, l’indépendance commence à être revendiquée de toutes parts.

En 1959, l’agitation gagne toutes les couches de la population :

  • En janvier, de violentes émeutes éclatent à Léopoldville. Ecoles, missions et magasins sont saccagés ; l’intervention des forces de l’ordre fait 200 victimes africaines
  • Au cours des mois suivants, les partis politiques qui se sont créés entre-temps, exigent l’indépendance immédiate
  • Dans le Bas-Congo, la population se rallie à la seule autorité d’un chef de parti, Joseph Kasavubu.
  • Réagissant dans le prolongement des émeutes de janvier, le roi Baudouin proclame la volonté de la Belgique de « conduire la population congolaise à l’indépendance ».
  • De son côté, le gouvernement belge entend éviter d’alimenter le conflit et décide d’accélérer la marche vers l’indépendance en concertation avec les Congolais.

En janvier 1960, une conférence belgo-congolaise dite de la Table Ronde s’ouvre à Bruxelles. Elle fixe au 30 juin suivant l’accession à l’indépendance. Malgré le délai extrêmement serré, le calendrier est respecté.

Les Chambres, élues en mai, désignent :

  • Joseph Kasavubu comme chef de l’Etat
  • Patrice Lumumba comme Premier Ministre.
Baudouin 1er Kasavubu Lumumba Conférence belgo-congolaise
Baudouin 1er 
Encyclopédie Alpha, p. 740
Joseph Kasavubu   Patrice Lumumba   Conférence belgo-congolaise dite de la Table Ronde 
150 ans d’expansion et de colonisation, p. 82 


L’indépendance est proclamée à Léopoldville le 30 juin 1960. Le roi Baudouin, dans son discours, dresse un bilan positif de l’œuvre belge au Congo. Dans la foulée du discours royal et bousculant le protocole, Patrice Lumumba se lance dans un violent réquisitoire où il s’étend sur les nombreuses souffrances que les Belges ont inculquées aux Congolais.

Mais le chaos ne tarde pas à s’installer dans la jeune République du Congo :

  • Quelques jours après l’indépendance, de violents incidents éclatent et la Belgique doit évacuer ses ressortissants.
  • De son côté, la province du Katanga fait sécession le 11 juillet 1960 sous la direction de Moïse Tshombé.
  • Profitant des désordres, le chef de l’armée, le colonel Joseph Mobutu s’empare du pouvoir en septembre
  • Lumumba est arrêté, emmené au Katanga où il sera exécuté en janvier 1961.
Tshombé Mobutu
Moïse Tshombé  
150 ans d’expansion et de colonisation, p. 82
Joseph Mobutu 
Chronologie de la Belgique de 1830 à nos jours, p. 266


Le destin de l’Etat souverain du Congo est en marche ; il devra faire face à bien des vicissitudes …

 

Source : histoire-des-belges.be

Date de dernière mise à jour : samedi, 16 mars 2019

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