* RDC : Ethnie Nande ou Ba Nande (Peuple du Nord-Kivu)

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Les Nande sont une population bantoue d'Afrique centrale établie dans l'est de la République démocratique du Congo dans les territoires de Beniet Lubero, dans la province du Nord-Kivu, également en Ouganda où ils sont appelés Konjo. Les Nande, constituent dans les territoires de Beni et de Lubero, la population prédominante du point de vue numérique, sont originaires de Muhulungu sur la rive droite proche de la rivière Semliki, et de la côte Ouest du lac Edouard. De cette grotte d’Isonga, Muhiyi, premier explorateur Nande du Nord-Kivu, visita Vitungwe où il installera son «Ekikali» ( ou quartier général), Isale, Malio, Kasongwere.

 

Le 20/02/2018

 

Présentation du peuple Nandé

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Répartition géographique

 

     Les Nandé habitent principalement la province du Nord-Kivu dans les territoires administratifs de Beni et de Lubero, ainsi que dans la ville de Goma et les territoires voisins de Rutshuru, Walikale, Masisi, Nyiragongo. Les Nandé se retrouvent aussi dans la province voisine orientale (ex-Haut Zaïre) ainsi que dans les principales agglomérations du pays. Au regard des statistiques officielles de la République démocratique du Congo, le peuple Nandé représente 60 % de la population de la province du Nord-Kivu (Recensement scientifique de 1984). Dans la région des Grands Lacs, les Nandé sont pacifiques. Ils ont toujours évité toute hostilité privilégiant le dialogue avec les peuples voisins.

    Le peuple Nandé est connu dans tout le pays et dans les pays voisins (notamment, l'Ouganda, le Rwanda, le Burundi, le Kenya et la Tanzanie) comme étant un des peuples les plus entreprenants sur le plan économique. Les hommes d'affaires Nandé approvisionnent toute la sous-région et la République Démocratique du Congo toute entière, non seulement en produits agricoles(légumes, oignons, pommes de terre, choux, carottes, fruits divers, café,thé, papaïne...) par suite du travail de la terre, son bien le plus précieux,mais également en biens industriels et manufactures provenant des contrées lointaines telles que Emirats Arabes Unis (Dubaï), Europe, Hong Kong, Japon, Nigeria, Taiwan etc... Malgré la crise économique qui frappait tout le pays durant le règne de Mobutu, la region de Beni-Lubero et la ville de Butembo ont maintenu une activité économique florissante.Une certaine industrialisation avait commence dans la région a l'initiative de l’élite économique locale. Le peuple Nandé a également produit une élite intellectuelle qui s'est distinguée dans tous les domaines de la vie nationale, et particulièrement :

- dans la société civile et les ONG de développement

- dans l’église catholique et protestante;

- dans l'enseignement supérieur et universitaire;

- dans la gestion publique du pays;
- dans les partis politiques.
Le peuple Nandé a également contribué de façon très importante à la lutte de libération, non seulement en fournissant à l'AFDL de milliers de combattants mais aussi par une contribution financière et matérielle majeure.

 

 

Origine et migrations des Nandé

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Les Nande, qui constituent dans les territoires de Beni et de Lubero, la population prédominante du point de vue numérique, sont originaires de Muhulungu sur la rive droite proche de la rivière Semliki, et de la côte Ouest du lac Edouard. Bien avant leur installation dans ces montagnes, ils vinrent de Toro par le Busongora, il y a environs 200 ans.

 

Contexte historique et géographique : Les Nande avant l’arrivée des Blancs

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    Le peuple Nande ou les Banande ou encore les Wanande sont une confédération de plusieurs clans ou tribus que l’on peut considérer, d’après Mashauri Kule Tambite, comme des États, mais qui parlent la même langue, le Kinande. De nos jours, certains chercheurs Nande pensent que ce nom est récent et qu’il conviendrait d’utiliser l’appellation « Yira » ou « Bayira » qui serait plus originelle. C’est le point de vue, par exemple, de Mashauri qui croit que le nom Wanande serait une déformation du mot swahili wanaenda, dans la bouche des Arabisés marchands d’esclaves et d’ivoire qui disaient par ce mot « ils partent ou ils fuient » en constatant que les habitants des villages avaient fui avant leur arrivée.

 

Les Nande dans la « Rift Valley »

    La présence des Nande dans la vallée du Semliki, qui est actuellement devenue une partie du parc national des Virunga, serait assez ancienne. En effet, d’après Randall Packard, les pierres ayant servi de meules pour moudre l’éleusine et le millet, trouvées sur les rivages de la rivières Semliki et d’autres à un niveau plus profond par les fouilles archéologiques faites à Ishango et les traditions récoltées aussi bien à la pêcherie de Kyavinyonge sur la rive nord du lac Edouard qu’au chef-lieu de la chefferie des Bashu à « Isale », témoignent d’une présence très ancienne d’agriculteurs Nande et Konjo dans cette partie ouest du fossé d’effondrement (Rift Valley). Bien d’autres peuples ont habité sur la rive orientale de la rivière Semliki qui traverse ledit fossé.

    En effet, dans son étude « Les Fouilles d’Ishango », Jean de Heinzelin de Braucourt, établit que l’arrivée des Bantu, qui introduisirent l’usage du fer en Afrique centrale, peut être située vers le premier millénaire de notre ère et que celle des Hamites est très récente22. Beaucoup d’objets révélés par les fouilles, bien que d’époque très ancienne, se retrouvent dans l’outillage que relatent les traditions Nande. Les objets de fer, les perles et autres objets de parure en nacre (espèce de coquillage), certaines matières minérales dont l’ocre (terre argileuse) et l’hématite, les pierres ayant servi de meules et de molettes, les pilons, les engins de pêches dont les harpons mis au jour par ces fouilles rappellent ceux que les Nande utilisaient jusqu’à une période récente. Le professeur Isidore Ndaywel è Nziem estime que les Nande, les Hunde, les Nyanga, les Shi et d’autres peuples se seraient installés par vagues successives dans cette région pastorale du Kivu, à l’Ouest du lac Edouard et entre les volcans, vers les 16ème et 17ème siècles, si l’on s’en tient à des repères les plus tardifs ; sinon il faut remonter plus haut dans le temps jusqu’au 14ème siècle.

    Les Nande, comme les autres peuples qui ont habité dans la vallée, auraient alors perpétué une très vieille civilisation des Bantu, sédentaires, comme le prouvent, dit Jean de Heinzelin de Braucourt, les meules et les molettes, ces lourdes masses de pierres malaisément transportables et peu utiles au nomades vivant au jour le jour, mais commodes aux habitants d’une communauté stable dont les actes de broyer et de moudre sont habituels, vivant de la culture, de la pêche, de la chasse24 et, faut-il ajouter, progressivement de l’élevage. La présence des Nande dans la plaine de Semliki n’est pas aussi récente, comme le laisserait croire certaines légendes.   

 

Banque mondiale2 6

 

 

La montée des Nande dans les Mitumba

Vers le 16ème et le 17ème siècle, les divers clans Nande auraient ensuite commencé, les uns après les autres, à se mouvoir de la vallée, à monter et pénétrer dans la forêt des Mitumba suite à certains facteurs d’ordre climatologique, sécuritaire, sanitaire et peut-être démographique. En effet, comme le montre Randall Packard, la sécheresse prolongée, les conflits avec les peuples éleveurs (les Hamites) et les maladies devenues endémiques, dont principalement la malaria, auraient contribué à ce déplacement progressif. Il ne faut pas confondre ce mouvement avec l’expulsion plus récente, en 1905, des populations, parmi lesquelles se trouvaient principalement les Nande, de la plaine de Semliki par l’administration belge à cause de la maladie du sommeil, qui y était devenue endémique et répétitive après le 19ème siècle, mais aussi à cause de la décision de constituer un vaste Parc National. La pénétration progressive de ce peuple dans la forêt qui couvrait la chaîne des montagnes dites actuellement Mitumba aurait donc commencé vers la fin du 16ème siècle et le début du 17ème siècle par vague successives de clans. Dans son étude, le Père Bergmans montre que ce mouvement de clans s’est fait en suivant deux directions : le premier groupe, celui des Bashu suivi des Baswagha, était parti du nord-est du lac Edouard vers le sud-ouest. Le deuxième, composé des Batangi et des Bamate, était parti du Sud-Est vers le Nord-Est dudit lac. Au sujet des Bashu et des Baswagha, le point de vue de Bergmans est confirmé par les témoignages de plusieurs vieux Nande : la tribu des « Bashu » ou, plus exactement « Basukali », aurait été la première à s’installer au pied des monts Mitumba. Ils seraient par la suite suivis par les Baswagha.

D’après la liste de Rendal Packard, basée sur les traditions de Isale, comme premiers peuplements Nande, il faut ajouter à ces deux clans les Bito, les Bakira, les Bahombo, les Bahera et les Batangi.

    En progressant dans la forêt des Mitumba, les Nande y auraient rencontré d’autres peuples qui les y auraient précédés. Ce sont, d’après Packard, les Bapere, Bapakombe, Bahira et Baamba et les Bambuti (Pygmées). La rencontre étant pacifique, ces peuples précurseurs, se seraient au fur et à mesure dirigés plus loin dans la forêt devant l’arrivée progressive des Nande. Au cours de ce mouvement progressif et durable, qu’il ne faut pas imaginer de façon légendaire comme une histoire de quelques jours, les hommes qui étaient les premiers à pénétrer un espace donné et à le déboiser pour y constituer des champs agricoles s’appelaient « abakondi » ou encore « abahasi » (les premiers à occuper et cultiver un espace géographique donné). Ils devenaient automatiquement propriétaires de cette espace de terre, pouvaient là louer à ceux qui venaient ensuite, les clients qu’ils appelaient « abasoki », et eux, les premiers occupants, devenaient les « bakama » (les propriétaires terriens). Ils recevaient annuellement de leurs clients une redevance (« omuhako » ou « engemo ») faite de produits de la terre ou de l’élevage et estimée selon l’étendue des champs cultivés. C’est parmi ces patrons (abakama), à mon sens, que se retrouvait le chef, « mwami », de la tribu. Celle-ci était en fait un vaste ensemble constitué, par ordre croissant, de familles et de clans qui se reconnaissent comme appartenant au même lignage.

 

L’occupation définitive de l’ensemble du territoire

    L’espace-temps de deux ou trois siècles environ (du 16ème, 17ème et 18ème siècle) aura permis à cette confédération de clans de s’installer définitivement sur un espace géographique non négligeable comprenant actuellement les territoires administratifs de Beni et de Lubero, limités à l’Est par la frontière de la RDC d’avec l’Ouganda, à l’Ouest par la rivière Biena, au Nord par la forêt de l’Ituri et au Sud par la plaine de la Rwindi. Tel est le bercail des Nande, dont certains, pour des raisons de commerce, d’études ou de travail, se retrouvent actuellement un peu partout en RDC. Tous les clans Nande vont développer un mode de vie réglementé par des lois et coutumes communes et une organisation politique assez originale. En effet, les Nande n’ont jamais constitué une masse populaire confuse des serfs (bayira) sous la monarchie d’un roi. C’est un peuple uni, certes, mais constitué de clans, que Bergmans considère comme des tribus distinctes, ayant chacune un « mwami », qui sera appelé ou remplacé plus tard, dans l’administration coloniale, par un « Grand Chef », et un espace géographique aux frontières bien délimités. Le récit légendaire de leur origine dans une même famille les unit, fonde la reconnaissance, la solidarité et le respect mutuel. Il y avait certes des luttes intestines provoquées par l’appropriation ou l’expropriation d’une terre ou le déplacement d’une borne limitant la terre d’une famille ou, plus grave, d’une tribu. Mais ces conflits se réglaient entre « bami » (Chefs).

 

La vie familiale ancestrale nande

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     La vie familiale des Nande est basée sur le système du patriarcat. Le père (pater familias) est plus qu'un mari pour la femme, il est son époux, le chef de la famille, le responsable des membres de son foyer, le garant de son unité, de sa vie et de sa survie. Bien que la femme ait un statut juridique contenu dans celui de son mari, elle jouit des relations de complémentarité avec son mari, de l'attachement de son mari, de son respect, de sa fidélité, de la dignité d'être épouse et éducatrice des enfants, du prestige d'être considérée comme une reine (omugole) qui lui donne une autorité morale dans la gérance des affaires familiales et du foyer, d'être l'intermédiaire entre le père et ses fils.

Le rôle d'épouse, de mère et d'éducatrice est si délicat que les femmes sont parfois inculpées pour les erreurs de leurs enfants bien que ceux-ci aient atteint l'âge de raison. Ces enfants doivent momentanément quitter la maison paternelle pour être rééduqués par un oncle maternel (nyokolume : homme-femme) ou une tante paternelle (nyinyalume : femme-homme). Cette humiliante sanction pour les enfants est culturellement ressentie comme une perte de sa dignité d’homme ou de femme : la fille est prise pour un garçon et inversement, le garçon est considéré comme une fille.

Dans cette mesure disciplinaire, les Nande estiment qu’une fille qui a le caractère d'un homme doit être remise entre les mains de sa tante paternelle, et le garçon, chez son oncle maternel. Les qualificatifs « paternel et maternel » sont suggestifs. Cette inversion apparente de rôle laisse percevoir la vision de la tante paternelle et de l’oncle maternel. Elle implique que l’éducation de la fille revient à la maman tandis que celle du garçon revient au père de la famille.

Dans le cas où le comportement de l’un ou l’autre enfant ne correspondrait pas à son sexe, ce sont les parents issus du côté maternel, pour le garçon, ou du côté paternel, pour la fille, qui peuvent remodeler le caractère de ces enfants. Leur rôle est de rappeler les attentes de la société vis-à-vis de la fille ou du garçon : la douceur et la tendresse pour celle-là, la virilité pour ce dernier 14 .

Dans la famille chaque enfant porte un nom qui souligne son identité et sa personnalité. Les noms peuvent indiquer le rang de naissance, les circonstances, les événements que traversent la famille ou encore le nom d'un ancêtre proche. Hormis les noms de naissance, on rencontre aussi des noms donnés à la naissance. Ils sont en rapport avec l’état physique de l’enfant ou les circonstances qui accompagnent l’accouchement.

D’autres noms sont donnés par la maman de l’enfant. Ils sont en relation avec la vie familiale et traduisent les compliments de la mère à l’adresse du père de l’enfant, des plaintes contre le mari et les siens, plaintes contre ses coépouses dans le cas de polygamie, des moqueries de la mère, des complaintes sans destinataire déterminé (grognes), des menaces contre son mari, des remerciements à l’égard de la famille de la mère.

Il existe aussi des noms que la maman donne à un enfant qui a déjà grandi, ou que les membres de la famille peuvent donner à l’un des leurs, et enfin des surnoms données au grandes personnes. Ces noms donnés aux adultes soulignent souvent des traits de caractère de la personne comme les noms reçus lors de l’initiation masculine 15 .

Lors de la politique de l'authenticité en 1972, le Congo devenant lui-même Zaïre, les noms furent revalorisés et les prénoms chrétiens supprimés. Dès lors, les noms des grands-parents et des ancêtres figurèrent dans les registres de l'État et des paroisses à tel point que celui qui perdait sa carte de baptême avait des difficultés à faire reconnaître son identité.

On introduisit alors des noms de famille qui permettent d'identifier mes origines et la famille élargie d’une personne. Mieux que les noms chrétiens 16 , dont le sens est souvent inconnu et dont la prononciation n'est parfois pas facile, les noms traditionnels traduisent l'identité familiale parfois replacée dans son contexte historique. Ils permettent de préciser les circonstances de la naissance et d'orienter l'éducation de l'enfant ou de rappeler le souvenir d’un ancêtre ou d’un défunt. Le nom véhicule un message, un contexte, un appel et un caractère 17 .

La famille nande est monogamique et exogamique. Elle va au-delà de la consanguinité. Elle inclut en son sein le fœtus, les vivants et les morts ainsi que les personnes adoptées. Elle englobe les membres des familles de ceux qui se sont unis par le pacte de sang (ekihango) et par les alliances matrimoniales (eritahya18 . Ce réseau de relations parentales, familiales, claniques, communautaires et sociales, est à l'origine de l'expression nande : « nous sommes de la même famille (tulivahanda) ». Celle-ci implique l'unité ethnique malgré les différentes dénominations tribales des Baswagha, Batangi, Bashu et autres.

Ces liens de parenté induisent des comportements et des attitudes spécifiques dans les rapports interpersonnels et sociaux. En fait, dans la culture nande, il n’y a que les familiers qui peuvent connaître le nom de famille des uns et des autres. Désigner quelqu’un par son nom de famille signifie concrètement que l’on a une connaissance profonde de cette personne. Appeler quelqu'un par son nom de parenté ou de famille, c'est s'engager dans des relations spécifiques avec lui 19 .

Ce fait incite les parents à encourager les enfants à n’utiliser que les noms courants des personnes et non ceux qui sont liés à leurs familles. Il n’est pas question seulement de discrétion à l’égard des personnes et de leurs familles mais aussi du respect qui leur est du. Ainsi, l’usage des noms usuels, selon l’ordre de succession de naissance est le plus utilisé. Nous les retrouvons sur le tableau ci-dessous :

Succession des noms de naissance chez les Nande

Sexe

Masculin

Féminin

1.

Nzanzu, Kambere, Kanyere, Paluku

Nzanzu, Kambere, Kanyere, Masika

2.

Kambale, Tsongo, Kambasu

Kavira, Katsiravwenge

3.

Kasereka, Kamate, Kabuyaya

Kaswera, Kavugho

4.

Kakule

Mbambu, Kahambu

5.

Tembo

Katungu,

6.

Mbusa

Kyakimwa

(Cadet)

Ndungo

Katia, Kalivanda

 

 

Par ces noms, on perçoit immédiatement quel ordre l’enfant occupe dans la famille 20 . Dans la même perspective, on n’appelle pas un parent par son nom, on l’identifie par son fils ou sa fille : le papa ou la maman d’un tel. Les rapports entre les personnes varient selon les types relations que ces personnes entretiennent entre elles : appeler quelqu'un père fait transparaître l'autorité et la protection ; mère, l'affection ; oncle, la familiarité, et grand-père, l'ami ou le frère.

L’appellation grand frère connote une ascendance qui exige le respect et l'obéissance, celle de cousine implique l'amitié profonde, la belle-famille, un dialogue sincère avec des sentiments respectueux accompagnés de honte. La grand-mère peut appeler son petit-fils son mari pour témoigner par plaisanterie de quelle affection il l’entoure. Dans le même ordre, il existe des relations amicales de plaisanteries fâcheuses entre les cousins (ekyavise). Ces insultes ne sont pas sanctionnées car, en réalité, elles ne cherchent pas à nuire à la personne 21 .

Bien que monogamique et exogamique, la culture tolère néanmoins la polygamie pour certaines personnes, dans des circonstances particulières. L'exiguïté du domicile, les nombreux visiteurs qu'ils reçoivent, ainsi que les longues tournées dans leur royaume justifient la polygamie pour les chefs. Certains, pour des raisons de richesse, de prestige peuvent se faire polygames. Ils vivent, cependant, psychologiquement en marge de la société qui ne reconnaît que la première épouse comme mère et reine (omughole).

Il existe culturellement des cas de polygamie et de polyandrie vécus dans la clandestinité et dans des domiciles séparés. Ces situations sont des mesures palliatives à la stérilité de l’un des conjoints. Elles peuvent se rencontrer aussi dans les circonstances qui permettent l'adoption de la veuve (erisighalya) de son frère ou un remariage avec la sœur d'une épouse stérile. Le but poursuivi est de donner une progéniture à la famille, de maintenir la stabilité du foyer et de sauvegarder les relations harmonieuses nées de l'alliance matrimoniale entre les deux familles.

Ces valeurs de stabilité de la famille, accompagnées du souci d'assurer une continuité linéaire des ancêtres dans la progéniture, incitent les Nande à éviter le divorce. Ce dernier peut être permis lors de la stérilité et de l'impuissance de l’un des conjoints. Pour maintenir l’alliance contractée entre les deux familles, du côté de la conjointe, il arrivait que la belle-famille donne une autre fille au garçon, moyennant une dot symbolique. Dans le cas de l’homme, le frère mari stérile ou impuissant donnait une progéniture à la femme.

Ces situations extrêmes étaient des rares. Ces solutions tournaient autour de la dot (10 chèvres) difficile à restituer par la belle-famille dans le cas de la maladie de la conjointe, et inversement de l’amour difficile à rompre quand la conjointe aime son mari. En tout, l’alliance matrimoniale à sauvegarder commandait aux attitudes à prendre dans ces situations de maladie 22 .

L'infidélité réitérée de l'épouse, l'aversion naturelle, l'entêtement, la paresse, la fuite de la femme de son toit conjugal, et, parfois, les maladies incurables pouvaient conduire au divorce si la partie concernée ne parvenait pas à amender son comportement. Cette blessure sociale ne brise pas nécessairement les relations entre les deux familles qui entretiennent souvent de bonnes relations amicales qui vont jusqu'à l'obligation morale d'entraide et à la solidarité.

Ce vécu familial nous pousse à dégager les différents caractères et fonctions de la famille. Elle comporte une dimension religieuse et sacrée, et elle joue un rôle culturel et politique. Par ailleurs, elle a une fonction sociale, éducative, et économique. Par sa « fonction régénératrice de la vie » qui procède de Dieu et par son lien de solidarité entre les vivants et les défunts, la famille revêt un caractère sacré et religieux à tel point qu'elle peut être comprise comme le « lieu spirituel » unissant les hommes qui remontent à l'ancêtre mythique commun situé dans un temps reculé. Dans cette vision, la naissance suivie du rite de l'exposition du nouveau-né au soleil, est prise comme une « épiphanie de l'ancêtre » dans l'enfant qui peut même porter son nom 23 .

L'union à l'ancêtre commun pousse la famille à exercer une certaine fonction politique dans la communauté. Le fait d'être parent implique une responsabilité vis-à-vis de son foyer et de la société. Ainsi, le chef de la famille (mukulu wa vandu) ou aîné du clan participe avec sa suite à la gestion communautaire de la vie du clan et du village. Il préside les palabres familiales, représente le clan dans les affaires interclaniques, communique les décisions qui en découlent, et enseigne l'histoire de sa famille et du village (evinywa vy'eka) aux siens. Il a aussi une fonction religieuse, celle d’être l’officiant lors des sacrifices aux mânes des ancêtres familiaux 24 .

Cette relation avec le village confère à la famille une « fonction d'éducation et de socialisation » qui va de la famille restreinte (nucléaire) à la famille élargie qui comprend ceux qui sont unis par les liens de consanguinité, de pacte de sang, d'adoption, d'appartenance au patrimoine ancestral, et des liens d'alliances matrimoniales.

La famille se prête alors comme un « lieu de l'approfondissement de la connaissance de soi et de socialisation » par l'initiation à la vie communautaire disciplinée constituée de personnes équilibrées et de caractère (omutima) courageux (omuhwa) et fermes (ovulume), et animées d’un esprit de collaboration et de coresponsabilité (ovwangiriri). Cet apprentissage initie à l'habileté, à la promptitude dans l'action, au goût du travail (ovukali) bien fait et incite à l'esprit d'initiative, à savoir se débrouiller (amenge) et se défendre (eriyilwirako).

Enfin, la famille a un « rôle d'éducateur à la vie économique » dont la source est la terre ancestrale (eririma) qu'il faut exploiter en commun dans l'entraide (ovuwatikania) et le partage des produits personnels et de la communauté 25 . Cette terre ancestrale est un don et un héritage inaliénable qu’il faut défendre contre l’usurpateur. L’attachement à cette terre maintient la famille dans la cohésion, la solidarité et l’interdépendance mutuelle.

 

 

Culture - Art

 

Chez les Nande, « omunde » est le « chant et la danse de l’épervier » : c’est un chant qui imite l’oiseau comme appât de chasse. Il y a aussi d’autres variétés comme « Matakiyo » …  « Matackyo » des Nande est un chant en l’honneur de nouveaux mariés.

 

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un joueur de flite de la communauté Nande

 

Mythes et croyances 

 

1. Heurt entre la culture nande et la culture chrétienne

 

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    Ce premier aspect conclusif souligne d’abord succinctement les aspects qui constituent les grands axes de la culture nande. Il dégage ensuite l’attitude des agents de la colonisation à l’égard de la culture nande. Il dégagera enfin l’affrontement culturel des nande avec le christianisme ou encore l’attitude que la population locale adopta vis-à-vis de la nouvelle religion chrétienne.

Du point de vue culturel, plusieurs aspects concourent au développement de la vie spirituelle. La relation du Nande avec le cosmos, l’attachement à la terre à cause de ses travaux champêtres et agricoles, ses relations communautaires en famille, le clan, et le sa perception indissociable du monde visible et invisible en interaction culminent dans des questions existentielles.

Ces interrogations portent essentiellement sur le créateur et la destinée de l’homme. Elles trouvent des réponses dans les manifestations religieuses, les rites, les sacrifices et le culte. La religion pour le Nande devient ainsi une expression de l’expérience vécue de l’homme situé par rapport à lui-même et à la communauté, au monde visible et invisible des défunts, des ancêtres, et du Dieu-Nyamuhanga. Ces tissus de relations constituent alors pour le Nande un univers sacré, indissolublement uni, et régi par Dieu. Ces mêmes relations appellent à une vie de communion.

Pour les Nande, le Dieu-Nyamuhanga transmet la vie à travers les ancêtres à la famille qui revêt un caractère sacré et religieux. La vie englobe ceux qui sont unis par le lien du sang, par le pacte de sang, par les relations de parrainage, par une profonde amitié, et même par l’appartenance au même village.

Au niveau communautaire et social, le Dieu-Nyamuhanga transmet la vie, par le roi, les chefs du clan et de la famille, considérée comme le bien le plus précieux ici sur terre, non seulement pour les individus mais pour la communauté tout entière. En vivant des relations harmonieuses avec ces représentants de Dieu dans ce monde, chaque personne reste étroitement unie à l’Etre suprême, et à tous les membres du groupe.

Parmi ces représentants le roi occupe une place centrale. De par sa mort et sa résurrection symboliques, il appartient, selon la croyance nande, au monde invisible et visible. Ainsi, devient-il le médiateur entre les vivants et les morts. Ce statut social lui octroie un rôle sacerdotal qui fait de lui le grand sacrificateur au Dieu-Nyamuhanga et aux ancêtres pour attirer les bénédictions divines sur la communauté. De lui dépend donc la prospérité et la vie du groupe.

Dans la vie ordinaire, la communauté, à son tour, reste traditionnellement liée au monde invisible. Ce fait entraîne une relation profonde avec le divin et les ancêtres à tel point que la vie et les activités humaines sont orientées à Dieu. Ce phénomène explique les rites agraires, les rites autour de la naissance, de l’initiation, du mariage, de la vieillesse, et de la mort. La vénération des ancêtres, et le grand culte sacrificiel à Dieu correspondent à cet objectif.

Cette religiosité trouve son fondement dans la vision traditionnelle de la religion et de Dieu. Le Dieu unique, Nyamuhanga, dans son mode propre d’existence, se manifeste et intervient, par l’intermédiaire des esprits et des ancêtres, dans les différentes circonstances de la vie humaine selon les besoins de l’homme ou de la communauté. Ces expériences de Dieu poussent les hommes dans diverses attitudes religieuses : la louange, l’intercession, l’imploration du pardon divin, et la crainte de Dieu.

La conception du Dieu-Nyamuhanga fonde la moralité des Nande qui culmine dans la vénération des ancêtres. Le culte des ancêtres est réservé aux hommes qui ont pleinement vécu les exigences vertueuses de la culture à savoir l’adoration du Dieu unique, la vie familiale féconde et épanouie, la promotion d’un travail réussi, le respect de la coutume ancestrale et de la tradition, et enfin le respect du secret initiatique.

La vie ancestrale, considérée comme une vie de béatitude, reste une hantise pour les Nande. C’est pourquoi toute la formation reçue tout au long du cycle vital de l’homme, -la naissance et rite de l’exposition de l’enfant au soleil (erihulukya), les rites de l’initiation féminine (erihinga) et masculine (olusumba), l’installation des nouveaux conjoints dans leur foyer (ovukwik’amahigha), et les rites mortuaires-, n’a d’autre finalité que de favoriser le passage de cette vie au monde de l’au-delà auprès des ancêtres.

C’est alors que nous pouvons comprendre le fait que toute transgression de la tradition ancestrale engendre des perturbations dans la conscience morale de la personne et dans sa vie individuelle. Elles peuvent avoir aussi des répercussions non seulement sur la vie communautaire mais sur le monde environnant.

Ainsi les Nande s’évertuent-ils à conformer leur vie aux normes morales de la culture. Elles gardent une dimension théocentrique dans une relation verticale avec Dieu et les Ancêtres, une dimension anthropocentrique dans un rapport horizontal avec le groupe, et une dimension cosmique dans le lien avec l’univers. C’est pourquoi les Nande distinguent les péchés contre Dieu, contre les personnes et les objets sacrés, contre le village, contre soi-même, contre la vie communautaire et contre le pays, et le péché du sorcier, l’asocial.

C’est dans cette culture nande que le christianisme s’inséra à partir de la fin du XIXe siècle. Il apparut, pour les autochtones, comme une religion qui renforce les valeurs culturelles, les enrichit, et les réoriente en leur donnant une vision chrétienne. Ce second aspect lié au christianisme fut déterminant dans la transformation culturelle et religieuse des Nande.

L’enseignement missionnaire sur le christianisme s’articulait autour de cinq axes principaux : le Dieu trinitaire ; l’alliance de Dieu avec son peuple ; l’incarnation du Fils de Dieu qui permet la rédemption du genre humain par sa mort sur une croix et par sa résurrection ; l’Église considérée comme la grande famille des enfants de Dieu ; et la communion des saints dans une perspective eschatologique qui aboutit à la promesse d’une vie éternelle dans le paradis auprès de Dieu.

Cette nouvelle religion, « révélée », enseignait une création divine ex nihilo et prêchait que l’homme est créé à l’image de Dieu. Elle recommandait une charité qui s’étend aussi aux ennemis, la pratique du décalogue, une diversité de prières et de dévotions. Elle célèbre, quotidiennement, l’Eucharistie qui identifiée au corps et au sang du Christ, et à son sacrifice sanglant sur la croix pour la rémission des péchés. On adhère à la nouvelle religion par « l’eau régénératrice du baptême ». Les membres de la nouvelle religion ont comme signe distinctif une croix ou une médaille, et le chapelet qu’ils récitent.

Auprès des convertis, ces aspects du christianisme furent une nouveauté religieuse, mais furent aussi perçus comme un développement de la religion traditionnelle. Malgré la croyance nande en un Dieu unique, et malgré sa pratique d’une éthique proche du décalogue, les missionnaires ne pouvaient admettre une pratique religieuse chez les Nande, mais des pratiques superstitieuses à combattre. Ainsi, furent sapés les fondements de la culture nande, ses croyances, ses cérémonies et ses rites liés à la vie humaine, les puissances divines protecteurs de l’homme, et son espérance la vie dans le monde invisible du divin et des ancêtres.

Du point de vue de la morale chrétienne, l’éthique nande qu’on peut rapprocher de l’enseignement du décalogue n’en était pas une. Aux yeux des missionnaires, l’application rigoureuse de la peine qui servait de parade à l’expansion de ces infractions dans la communauté était inadmissible. En réalité, les Nande prévoyaient des sanctions qui ne respectaient pas la dignité humaine prônée par le christianisme.

Il s’agissait entre autres de la peine capitale, de l’exil, de l’épreuve du poison (ovwenda), la livraison des voleurs aux rapaces, les sept fouets administrés au sexe masculin pour l’adultère, la relégation des menteurs qui empoisonnent les relations humaines et communautaires, et l’exil des sorciers. La sanction des coupables correspondait au degré de la gravité du mal qui porte atteinte à la vie des personnes et à la communauté.

Ce fut dans ce contexte culturel nande que le christianisme se présenta comme ayant une valeur purificatrice et libératrice. Cette prise de conscience que le christianisme comporte des valeurs enrichissantes explique le fait que la population réclame des catéchistes, qu’elle revendique la présence des Pères dans leur village, et que des chrétiens s’improvisent comme des catéchistes dans leur milieu 1764 .

De leur côté, les chefs entrèrent dans l’esprit des temps nouveaux. La conversion des chefs, gardiens et garants de la tradition, signifia pour le peuple que le christianisme faisait désormais partie de la culture et de la vie du peuple. Toutefois, elle n’entraîna pas forcément la conversion des détenteurs du pouvoir et le renoncement aux instruments royaux ancestraux. Ce fait se vérifia à la mort du mwami Biondi 1765 .

Cependant, s’opéra un tournant dans l’histoire du peuple. Le chef (Mwami), personne de référence dans la tradition, devait consulter un expatrié, le missionnaire ou son représentant, le prêtre ou le catéchiste qui sont des personnes étrangères à la famille royale, pour une question importante concernant la vie du peuple

Bien plus, le chef militaire (Ngabwe) et ses hommes n’avaient plus de raison d’être car la nouvelle religion prône la fraternité et la paix. Ainsi les guerriers furent réduits au silence. Enfin, le chef spirituel (Mukulu) céda la place au missionnaire, au prêtre autochtone et aux catéchistes, indépendamment de leur âge, et de leur statut social de leur famille d’origine. Ces nouveaux officiants ne rendent plus un culte ou un sacrifice au Dieu-Nyamuhanga, mais au Dieu de la religion chrétienne. Par la conversion des chefs traditionnels, toute la structure de la culture devint ébranlée. Elle s’apprêta alors à sa restructuration dans la nouvelle société établie par les Occidentaux.

La structure de la culture nande fut aussi attaquée par la collaboration des missionnaires avec les agents de l’Administration coloniale. La colonisation introduisit de nouvelles formes de solidarités basées sur la profession et les nouvelles classes sociales, parfois opposées : les citadins et les paysans, les lettrés et les analphabètes, les commis, les salariés et les chômeurs, ainsi que le groupe des policiers et des militaires, en temps de paix et de guerre.

La création des centres extra-coutumiers constitua un des éléments du démantèlement social et de l’amoindrissement du pouvoir du chef. Dans ce nouvel ordre social, le chef fut réduit à la servitude, aux corvées, à la prison 1766 sur un plan d’égalité avec ses subalternes, et même à la relégation 1767 . L’imposition de chefs, qui étaient parfois des usurpateurs, la création des chefs « couronnés », c’est-à-dire institués par l’Administration diminuèrent le prestige du chef traditionnel et son influence sur le peuple, et engendrèrent des conflits familiaux. À la longue, l’autorité du chef traditionnel fut réduite à une autorité morale auprès du peuple. Son opposition opiniâtre au nouvel occupant entraînait sa destitution. Par contre, sa reddition signifiait la cessation des hostilités. Elle impliquait aussi la soumission du chef traditionnel et celle de ses hommes aux agents de l’Administration de l’État.

Par ailleurs, avec la colonisation se formèrent deux juridictions parallèles : celle de l’agent de l’Administration, -la bureaucratie-, et celle du chef du village. La coercition dans les tribunaux supplanta le processus de réconciliation obtenue par la palabre. « Dédommagement et intérêt », expression réservée aux lettrées, remplaça le repas communautaire de pardon (ovulira haghuma) qui était un signe et un engagement à rétablir la paix et l’harmonie perdues à cause de différends entre les personnes.

Du point de vue économique, l’héritage de la terre ancestrale fut étatisé. Cela entraîna des pertes de terres arables qui devinrent des parcs nationaux, des réserves forestières, des cimetières, des domaines pour les missionnaires avec leurs écoles, leurs hôpitaux, et leurs religieuses. Par ailleurs, sur ces terres arables, on planta des produits industriels, caoutchouc, quinquina, pyrèthre (kilatère), quinquina, café, thé, papaye, dont one ne voyait pas directement la nécessité.

On initia aussi la population locale à l’agriculture intensive de reboisement (eucalyptus, cyprès blackwattle) et aux produits vivriers, nécessaires aux Européens et à leurs fonctionnaires, et l’exploitation de minerais d’or. Ces nouveaux produits contribuèrent à l’expropriation des terres de la population locale par l’État. Il ne favorisèrent pas, non plus, les produits locaux qui firent place aux produits de « l’agriculture obligatoire », notamment le soja, les haricots, les pommes de terre, le blé, le paddy, l’arachide, et autres.

L’introduction de l’industrie étouffa l’artisanat du fer, de la vannerie, et du textile, et fit apparaître le travail forcé, les corvées, des tracés de routes, parfois au milieu des villages. Le recrutement de la main-d’œuvre pour ces activités et la fixation de la circoncision après neuf ans vidèrent les villages de la force-vive de la jeunesse, et s’accompagnèrent de la famine dans la contrée (1943-1945). Le mauvais traitement lors de l’exécution de ces travaux fit que plusieurs préféraient déménager, loin de l’influence coloniale.

Soudain, les plantes industrielles et vivrières cohabitèrent avec les produits locaux, l’échange basé sur le troc fit place à la monnaie. La solidarité clanique s’orienta vers les membres d’une même coopérative agricole ou économique. Au sein d’une même société apparut la classe des riches et des pauvres, celle des fermiers et des paysans, des salariés et des prolétaires. Désormais, la richesse de la personne fut évaluée en fonction de la masse monétaire placée en banque. De - là surgit l’émulation mais aussi l’âpreté au gain et l’égoïsme.

Certes, à la pénétration des Européens dans la contrée (1894), la population fut libérée de l’emprise de la traite des esclaves et de l’influence des islamisés. Par ailleurs, grâce à l’introduction de la médecine la population fut guérie de certaines épidémies, la jaunisse (berbérie), la variole, la maladie du sommeil, et autres. Mais l’explication objective de la maladie ne guérissait les blessures morales et sociales qu’elle causait. C’est pourquoi, la médecine moderne coexiste avec la manière traditionnelle de guérir les maladies curables et incurables.

En outre, la colonisation introduisit l’école. Sa valeur n’étant pas perçue par la population autochtone, l’école prit un caractère obligatoire et forcé. Elle était surveillée par les policiers. L’école priva les familles du revenu de leurs champs en « enfermant la jeunesse dans des classes (en swahili, kufungia watoto mu masomo ou en kinande, erifungira avana vomukalasi,) ». Cette expression qui évoque un emprisonnement de la jeunesse à l’école accrut l’hostilité de la population locale. Cette répulsion s’aggravait quand les parents ou le chef du village étaient incarcérés pour l’absence de la jeunesse à l’école.

Néanmoins, elle commença à engendrer des déracinés du point de vue psychologique et culturel. Emancipés de leur milieu traditionnel, les élèves relativisèrent les croyances religieuses liées à la vie humaine : la mort, les cataclysmes naturels, les tabous, l’interprétation de la maladie, les sens des rites, et autres. Il se créa alors une nouvelle élite et une catégorie d’incultes, analphabètes. Cette élite sera à la source de la désintégration de l’harmonie sociale, à l’éveil du nationalisme, par la création d’une multiplicité des partis politiques.

Enfin, la dimension religieuse faisait partie du nouvel ordre colonial qui se donnait pour objectif : « la civilisation ». Celle-ci visait l’amélioration des conditions morales et sociales des populations autochtones, grâce à l’action missionnaire. Malgré les frictions qui pouvaient exister entre les missionnaires et les Agents de l’Administration, ce plan d’ensemble impliquait une certaine collaboration entre l’État et la mission. La charge des œuvres scolaires et hospitalières fut remise aux missions. Ces deux domaines sociaux devinrent aussi des moyens de christianisation. La civilisation prit une autre connotation : « la civilisation chrétienne ».

Dans ce contexte, les missionnaires cherchèrent à supplanter les croyances religieuses traditionnelles par la religion chrétienne. Le chef qui était le grand sacrificateur dans sa culture devint un fidèle comme tout autre chrétien, à l’unique condition de brûler les instruments ancestraux, de suivre le catéchisme, et de recevoir le baptême.

Cette perte du pouvoir religieux, social, et politique des chefs plaça les Nande dans une anomie culturelle. Ce fait explique les différentes formes de résistance aux étrangers : la méfiance, les mouvements kima et l’anyotisme. Le missionnaire les dénonçait, l’agent de l’Administration les réprimait. Cette situation coloniale provoqua une crise culturelle dont l’issue fut de s’abandonner au missionnaire. Ce « messager de Dieu » était perçu comme un recours parce qu’il était porteur des valeurs spirituelles, humaines et morales, contrairement au colonisateur réduit au statut d’envahisseur et d’agresseur.

 

Le mythe du grand Tambour

Le mythe du grand Tambour commence par l’histoire du couple et de la famille humaine. Il raconte que : “Là-haut, sur la colline de la création, plus haut que les nuages du Rwenzori, Dieu Nyamuhanga le Créateur donna à chaque créature une mission.

La vache Ende portait entre ses cornes un grand Tambour Risingi. Dieu Nyamuhanga y avait placé deux êtres humains : Kisi le Grand Soleil et Nyabhandu, la mère des hommes. Chacun était assis sur sa chaise royale e’ndeve et y respirait le parfum d’encens o’bhukwa ; pour voir l’autre dans cette obscurité Dieu Nyamuhanga  avait donné à Kisi  et à Nyabhandu une conscience o’bhulhengekania et des cheveux bio-efflorescents qui brillaient comme la luciole (e’ngununu). Ce grand Tambour était le pays de la grande paix O’bhuthekane.

Un jour, la vache voulut se soulager. Elle regarda en bas et fit tomber le grand Tambour. Elle courut vers Dieu Nyamuhanga pour se faire pardonner d’avoir perdu sa charge royale. Dieu Nyamuhanga l’envoya se réconcilier avec ceux qui étaient assis dans le grand Tambour qui devint une pirogue en s’écrasant sur le lac Mutsyamiria (le lac Edouard aujourd’hui). Pendant que le grand Tambour descendait à pique, Kisi le Grand Soleil bouscula Nyabhandu la mère des hommes. Celle-ci émit la première parole des hommes qui est une interrogation : « que fais-tu Ukayira uthi ? » D’où l’éthnonyme Yira donné aux Nande pour désigner le peuple de ceux qui sont nés après la première parole de nos Ancêtres Nyabhandu et Kisi. Le village qu’ils ont fondé s’appelle bhuhikira, le lieu où ils ont atterri ; l’enfant qui y est né, s’appelle Mukira l’ancêtre du clan Bakir; ils eurent beaucoup d’enfants, qui sont les Ancêtres fondateurs de tout le clan YIRA avec toutes ses ramifications”.


La traversée sur le dos du dragon (Omughongo we ndioka)
 

Ainsi, selon la mythologie transmise de père à fils, les nande traversèrent la rivière Semliki, sur le dos du dragon pour parvenir à l’autre rive au Congo. A dire vrai, le passage se fit au gué de Kapanza. Au moment de la sécheresse, les pierres émergent de l’eau de sorte qu’on peut facilement traverser le fleuve.

Ce sont ces pointes de pierres qui ont été comparées au dos écailleux du dragon que la tradition narrative véhicule de père à fils comme une mythologie, avec une idée religieuse sous-jacente. Cette traversée mystérieuse fut rendue possible grâce à l’intervention de l’esprit Katulikanzira, qui précéda le convoi des immigrants et les installa au lieu de son choix.

Néanmoins, lors de la traversée, une partie des Nande resta en Ouganda sur la côte est des monts du Ruwenzori et de la rivière Semliki qui séparent le Congo de l’Ouganda. Ceux-ci sont actuellement appelés Kondjo. Ils furent séparés géographiquement et administrativement de leurs frères nande lors du découpage et du partage de l’Afrique entre les grandes puissances européennes en 1885. Ils gardent, toutefois, les mêmes us et coutumes que les nande hormis les nuances linguistiques en kikondjo.


Le mythe cosmogonique du Ruwenzori
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La tradition Yira rapporte qu’un jour sur la colline de la création, le Dieu Créateur O’Muhangitshi exauça la prière des Nande qui étaient menacés par une famine due à une sécheresse très incendiaire. Il convoqua toutes les divinités célestes Bhalhimu qui se trouvent dans le monde pour le protéger. Il leur ordonna de transporter la montagne Ruwenzori pour aller la planter au milieu du pays des Nande qui manquaient terriblement d’eau.

Hangi l’Esprit de la providence et de la chance était au premier rang suivi de Mbolu la protectrice de la jeunesse féminine et Lusenge le protecteur de la jeunesse masculine. L’Esprit Kapipi le Maître de la forêt et de l’initiation à la sagesse, était au dernier rang entouré de sa meute de soixante-dix-sept chiens sacrés de la chasse. Le convoi comprenait aussi toutes les déesses chargées des présents à offrir en cadeaux à Dieu Nyamuhanga l’Etre Suprême dès leur arrivée au pays des Nande. Comme la Providence Hangi marchait très vite, l’Esprit Muhima le Grand Devin céleste, prétendit qu’il transportait seul la montagne Ruwenzori. Les autres divinités se fâchèrent et lâchèrent la montagne Ruwenzori pour faire comprendre au Grand Devin Muhima que seul, il était dans l’incapacité d’accomplir cette lourde tâche de transporter une montagne.

Pour calmer leur colère, l’Esprit de la Providence Hangi fit tomber la pluie sur tout le pays où sévissait la sécheresse. Il réconcilia tous les membres du cortège en les invitant au dialogue où la prise de parole fut donnée à chacun par l’Esprit Mulhekya le Pacificateur, joyeux d’avoir été rafraîchi par la douche céleste. Quand vint le tour des animaux de parler, le plus petit des chiens de la dernière meute de la divinité Kapipi adressa cette parole célèbre au Grand Devin Muhima : ” il faut savoir compter sur les autres “. C’est pourquoi le massif du Ruwenzori  est toujours là où les dieux l’avaient abandonné. Il n’a plus bougé, il continue à y faire couler l’eau fraîche de la Providence Hangi.

C’est la raison pour laquelle tous les rites de réconciliation entre les clans commencent par les gestes d’aspersion aux épaules et d’ablution aux pieds et la main avec de l’eau puisée au glacier du Ruwenzori ou Tsithwa –tsya- Nzururu qui veut dire la grande colline aux neiges éternelles en langue locale le kinande.

 

La Grotte de MUHIYI, Premier Nandé de Beni-Lubero

 

C'est ici que le Chef MUHIYI, premier Nandé du Nord-Kivu à traverser la rivière Kalemba (actuelle Semliki) au19 nième siècle en provenance du Royaume de Kitara (Ouganda) se reposa avec son chien de chasse pendant plusieurs semaines.

 

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Grotte historique des Nandé

 

De cette grotte d'Isonga, Muhiyi, premier explorateur Nandé duNord-Kivu, visita Vitungwe où il installera son « Ekikali » ( ou quartier général), Isale, Malio, Kasongwere. La région était alors peuplée d'éléphants, des lions, des léopards, etc. À l'arrivée des Nandé, les Pygmées prirent le large dans la foret vers l'Ouest. Il n' y avait pas eu de combat ni de génocide. Cette grotte d'Isonga est ainsi le symbole de l'exploration et de l'installation pacifiques du Nord-Kivu par Muhiyi ( un nom qui veut dire chasseur en Kinande). La grotte d'Isonga est donc aussi le symbole du pacifisme du Munande et de se coexistence pacifique avec les pygmées, les premiers citoyens de la R.D. Congo. Cette Grotte se trouve en Territoire de Beni, collectivité des Bashu,groupement Bunyuka, village d'Isonga-Vungwe, non loin de la rivière Talihya, au pied du Mont Mughulungu

 

 

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Les rites  

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    Lors des funérailles, à son enterrement, la tête du défunt est tournée vers l’Est, vers le soleil levant. Le temps du deuil est un temps où la vie ordinaire des travaux champêtres cesse. Il peut s’étendre sur une période assez longue selon le statut social du défunt. À la levée du deuil, la famille éprouvée prend un bain rituel le matin pour redonner force aux vivants et au défunt devenu ancêtre. Ce bain matinal est suivi d’un sacrifice de réconciliation avec le mort et avec sa famille. Après les funérailles, la famille du défunt consulte le devin pour punir le sorcier, le responsable de la maladie ou de la vieillesse malheureuse qui a emporté le regretté. Le devin invoque Kihara, la divinité judiciaire, pour désigner le sorcier, le malfaisant, afin qu’il soit sanctionné.

Chaque défunt a droit à un enterrement et à un culte de mort spécial selon son statut dans la société, à l’exception des excommuniés. Ce groupe des marginalisés est constitué, nous l’avons dit, par les sorciers, les suicidés, et le mukumbira, c'est-à-dire celui qui est socialement exclu de la communauté à cause des manquements graves comme celui de brûler la véranda, case commune des hommes d’un village, les unions incestueuses, les viols ou les rapts. Les lépreux et les victimes de berbérie ou d’hydropisie ne recevaient pas on plus les rites funéraires car ils étaient considérés comme atteints d’une malédiction divine. Ils sont jetés en brousse ou dans une case sans toit en proie au soleil et aux animaux sauvages.

Le culte des morts comporte une purification, un sacrifice, une danse sacrée et un repas communautaire et festif : “on va à Dieu sans tache et dans la joie”! Ces danses manifestent aussi le rôle que le défunt a exercé dans la communauté qui souhaite qu’il devienne un intercesseur auprès des ancêtres pour le bien-être des vivants 1627 .

Parmi les pratiques traditionnelles, la danse des morts, omukumo, était réservée aux hommes mariés. Il était exécuté sur un rythme de sept tambours dans le village du défunt. Le feu qui servait pour chauffer les tambours servait aussi pour rôtir la poule offerte aux batteurs des tam-tams. Le lendemain de la mort du défunt, les hommes des villages voisins se rendent au lieu de la mort, chacun armé de sa lance, et de son bouclier. Ils font ensuite le tour complet du village du défunt afin d'en assurer la sécurité ou de dénicher un éventuel sorcier caché dans les parages.

A leur entrée dans le village, ils lancent le cri d'ouverture de la danse. Placés en demi-cercle, ils commencent les jeux qui sont un simulacre de combat où tous, à tour de rôle de deux ou trois personnes, doivent participer. Par imprudence ou même parfois par vengeance, il arrivait que certaines personnes soient grièvement blessées. Les hommes négociaient immédiatement la réconciliation entre ces deux personnes.

Généralement, ces danseurs étaient rémunérés par une chèvre et la nourriture qu'ils allaient partager ensemble. Ils revenaient le surlendemain du jour du décès pour présenter leurs condoléances et réconforter par leurs présents ou leur présence les membres de la famille éprouvée 1628 .

La danse omukumo était aussi destinée aux initiés. Les jeunes garçons, avant et après leur grande initiation (olusumba), partent et rentrent au rythme du mukumo. Exécutée comme une danse mortuaire, elle était réservée uniquement aux hommes initiés et non aux femmes ni aux hommes circoncis dans un hôpital, ou dans un dispensaire à moins qu'ils ne se soient intégrés dans le rang des initiés en donnant une rançon (ovutegha) donnée aux anciens et au maître de l’initiation. Aux contraire, ils resteraient toujours considérés comme des incirconcis au même titre que les enfants et les femmes.

Quand un membre du mukumo venait à mourir, tous les initiés s'enfermaient dans la véranda et en bouchaient tous les orifices. Malheur aux non-initiés qui s'approcheraient de ce lieu où tous les hommes sont tenus de garder le secret initiatique que nul ne nous a encore révélé. Il serait châtié par la divinité de la circoncision (olusmba) et frappé d’une mort subite 1629 .

Enfermés toute la journée, ils ont prévu leur nourriture, leur viande boucanée, et leur bière de bananes mûres (akasikisi) pour ne pas crever de faim. De temps à autre, on peut entendre en sourdine et indistinctement leurs voix et des battements de tambours au rythme du mukumo. Ils sortent de ce lieu la nuit et invitent tout le peuple à danser le maghengereghenge.

Une autre forme de pratique mortuaire était la danse engwaki se déroule uniquement durant la nuit. D'allure pacifique, elle sert à éliminer la crainte dans l'obscurité de la nuit en pleine bananeraie. Plus surprenante était la danse ovusingiri réservé encore une fois à un homme marié. C'était l'art de montrer aux autres son art magique, sa puissance d'ensorcellement, de faire mourir et de ressusciter sa victime. Cette danse était exécutée en pleine nuit. Elle se distinguait par son rythme connu des jeunes qui prennent aussitôt leurs dispositions pour se retirer. Cette danse était réservée aux sorciers (avaloyi), aux guérisseurs (avasaki), aux féticheurs (avakumu) et à tous ceux qui, dans leur vie, ont participé à ces pratiques et à cette danse.

En outre,la danse endara, accompagnée par le xylophone, était très populaire lors des grandes solennités à savoir entre autres, l’investiture d’un roi, et le gand jour du sacrifice annuel. Elle servait aussi de rite mortuaire pour un chef, les membres de sa famille et pour les notables. Il commençait au premier chant du coq jusque dans la nuit.

Il existait aussi une danse commune lors des funérailles des hommes aussi bien que des femmes. Selon les régions, elle s'appelle ekilayiro, ou elisole. Elle était essentiellement exécutée par la jeunesse masculine et féminine à l'occasion de la mort des personnes mariées. Enfin, la danse amasinduka, exécutée sur un rythme de sept tambours, battus par des hommes, était essentiellement féminine. C'était une danse monotone que l'on pouvait jouer deux fois pendant le jour l'avant midi et à la tombée de la nuit 1630 .

En définitive, le but des rites funéraires qui pouvaient durer trois à sept jours selon que l'on était pauvre ou riche et un mois pour le chef, était de montrer sa solidarité avec le défunt et la famille éprouvée. C’était aussi un temps fort de rappeler les rôles respectifs que les défunts remplissaient dans la vie familiale. Bien que physiquement morts, ils demeurent vivants auprès des leurs.

Par ailleurs, un homme ou une femme, ayant honnêtement vécu sa vie, selon les normes culturelles et la tradition, ont droit aux funérailles solennelles. Cela s'explique par le respect dû à la dignité de la personne et de sa vie antérieure les défunts mènent une seconde vie dans le séjour des ancêtres qui est un monde sacré.

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Le Grand Chef Coutumier des Nande, Mwami IHEMBE

Du point de vue social, le culte des morts vise à favoriser la communion entre les vivants et les défunts, la cohésion familiale, le souvenir du défunt, la continuité de la vie terrestre dans celle de l’au-delà. C'est la raison pour laquelle, lors des rites funéraires, les anciens règlent les éventuels litiges qui peuvent exister dans la famille.

Ayant défendu la communauté clanique, le défunt fait l’honneur de la famille par sa vie vertueuse de solidarité, de travail, de conformité aux us et coutumes du clan et du village, de justice, de sagesse, et par sa progéniture comme aussi par sa fécondité. Il peut alors être considéré comme un ancêtre et être proposé comme un modèle à la communauté. Sa vie exemplaire devient le but poursuivi par toute la communauté des vivants qui modèlent leur vie sur la sienne. Du point de vue religieux, par le fait qu’ils vivent en paix auprès de Dieu, les ancêtres sont considérés comme des porteurs des bénédictions divines 1631 .

Enfin, les danses et les rites funéraires ont une dimension clanique, communautaire et sociale. Elles trouvent leur fondement dans le fait qu'on doit aller heureux dans le village des ancêtres même si elles servent aussi à dissiper la crainte et l'horreur provoquées par la mort, et à apaiser les mauvais esprits (evirimu).

Au contact avec le christianisme, ces anciennes pratiques et conceptions relatives à la mort ont presque disparu. Certaines sont même ignorées de la jeunesse montante à partir des années 1980. La raison pour laquelle le christianisme les a combattus réside dans le fait que certaines d'entre elles, notamment omukovo et ovusingiriomukumo, comportent des éléments de violence, de test de puissance surnaturelle, et une croyance aux mauvais esprits.

Par ailleurs, les missionnaires ont cru que ces rites funéraires étaient des occasions de débauche 1632 . Il est difficile de souscrire à ce préjugé d’autant que le temps que le temps des funérailles chez les Nande est un temps de continence sexuelle dans tout le village. Bien plus, la débauche, la fornication et les unions sexuelles illégitimes étaient fortement prohibées, réprouvées et condamnées par la société. Les coupables de ces forfaits ne jouissaient d'aucune estime dans la société. S'ils étaient jeunes, il était rare qu'ils contractent un mariage légitime.

Durant ce temps des funérailles, tous les travaux agraires étaient suspendus et les habitants du village restaient constamment auprès de la famille éprouvée. Celui qui vaquait ordinairement à ses affaires durant ce temps était considéré comme un sorcier, un asocial. On ne pouvait aller au champ que pour prendre les produits nécessaires qui serviront de nourriture durant le temps des funérailles.

Ce temps se terminait par un bain rituel matinal, la coupe des cheveux des membres de la famille éprouvée, et la levée officielle du deuil qui consiste à abattre les troncs des bananiers (eritw'emihiti). Cet abattage de troncs de bananiers ne pouvait se faire lors du deuil, car il était une indication pour le peuple toujours conscient du fait qu'un champ temporairement non entretenu est un singe de tristesse et de mort dans les environs. Ce n'est qu'après ces dernières cérémonies que la vie ordinaire dans le village pouvait recommencer.

Les autres facteurs qui contribuèrent à la disparition des cérémonies et des rites funéraires dans la culture nande au contact avec le christianisme sont d'ordre économique. Les jours de deuil devenaient onéreux pour la famille du défunt qui devait nourrir des visiteurs et ceux qui restaient auprès d’elle pendant plus de trois jours 1633 .

En outre, l'introduction chrétienne des suffrages pour les morts assimilés aux rites funéraires et au culte des ancêtres a remplacé ces pratiques traditionnelles des danses. Le réconfort des prêtres, des catéchistes, des groupes de prières organisés par les différents mouvements d'action catholique, et les diverses chorales ont prit la place l'assistance sociale des danseurs et de ceux qui viennent consoler la famille éprouvée.

Ainsi, les funérailles sont devenues des occasions d'approfondissement de la foi en la résurrection du Christ, premier-né d'entre les morts, de l'espérance chrétienne en la vie de l'au-delà, et de la pratique de la charité par les différents services et offrandes que les différents groupes de chrétiens apportent à la famille éprouvée. Le temps du deuil (maombolezo ou kilio en swahili, ekiriro en kinande, c’est-à-dire les lamentations, les pleurs) est devenu un temps de rassemblement de personnes venues soutenir la famille du défunt et son entourage par la prière et les chants liturgiques de différentes confessions religieuses 1634 .

Le refus des rites de passage vers l’état ancestral impliquait l’opposition aux rites qui s’échelonnent sur la vie de la personne humaine 1635 qui en étaient une préparation. Les cérémonies liées à la naissance de l’enfant sont aussi celles qui constituent l’initiation féminine dont le but était la formation de la jeune épouse à son nouveau statut social de mère (nyinya) et de reine (mughole) dans le foyer. Dans ce processus de refus se dégage nettement l’aspect purificateur et enrichissant du christianisme mais aussi la brisure d’avec la culture des ancêtres. Contre celle-ci, une partie des pratiques est maintenue comme le montre la première étape de cette initiation féminine. Le rite de la procession du panier (erihinga ou erihek’ekitiri) a seulement abandonné le sacrifice aux ancêtres, l’investiture de la future mère, la récolte des produits dans les champs même ceux des voisins, et le repas dont les commensaux étaient exclusivement les femmes, hormis le petit garçon qui symbolisait la présence des maris. Néanmoins, le contenu de ce rite n’a, en rien, modifié : la prise de conscience de l’état adulte de la jeune fille appelée à transmettre la vie, à favoriser l’harmonie conjugale du foyer du clan demeurent les élements-clefs de l’initiation féminine dans cette première étape. Ces éléments en appellent d’autres dont les valeurs sociales de dévouement familial, de maîtrise des coutumes du clan, et de modération dans le langage.

Dans la seconde étape de l’initiation féminine qui est directement liée à la naissance de l’enfant, les pratiques considérées comme païennes ont cédé la place aux valeurs modernes tout en préservant aux valeurs culturelles nande. Ce rite appelé erihulukya ou rite de l’exposition de l’enfant au soleil ne fait plus apparaître le bain rituel pour la purification, ni l’acte de brûler le lit d’accouchement qui signifiait le balayage des tabous qui accompagnaient l’accouchement 1636 . Mais le repas pour remercier la sage-femme qui a accompagné la jeune épouse (ovutsumbirano) ainsi que le repas communautaire entre les femmes (omusangano), forme d’intégration sociale de la jeune mère dans le groupe des mamans, subsiste. Le nouveau-né, qui fait la fierté du foyer et raffermit l’amour conjugal, renouvelle l’alliance matrimoniale entre les deux familles du mari et de son épouse.

Cet enfant reçoit une identité propre par l’imposition d’un nom social qu’il portera toute sa vie. Le sacrifice n’est plus offert aux divinités et aux ancêtres dans le dessein d’écarter les méfaits du sorcier, mais celui de consacrer l’enfant à Dieu. Cette consécration à Dieu est renforcée lors de la célébration du baptême durant lequel le nouveau-né reçoit une nouvelle identité, l’identité chrétienne, et une nouvelle intégration dans la famille de Dieu, l’Eglise.

La dernière étape de l’initiation féminine est constituée de dernières instructions (erikongomerera) préparant directement au mariage 1637 . Il s’agit d’une récapitulation d’instructions reçues de la tante paternelle lors de l’initiation. Le rôle de la tante paternelle est de grande importance car elle renseigne la future mariée aux traditions du clan dans lequel la future épouse vivra désormais durant toute sa vie.

La tante paternelle insiste auprès de la fiancée sur son nouveau statut social d’épouse (muraghane), de mère (nyinya) et de reine (mughole) dans son foyer. Elle entretient cette dernière sur l’art des cultures des champs, de vivre avec son mari, d’éduquer les enfants, et d’agrémenter la vie. Elle traite enfin de la qualité des relations qui doivent s’établir avec sa propre famille, avec la belle-famille, et avec la société 1638 .

Depuis l’introduction du christianisme chez les Nande (1906), ces instructions sont complétées par les agents de la christianisation qui insistent sur quatre valeurs : l’amour (kupendana en swahili/eryanzana en kinande), le respect (kuheshimiana/erisikania), le pardon (kusameheana/erighanyirana), et l’entraide (kusaidiana/eriwatikanya).

Ces aspects, qui figurent déjà dans la culture nande, sont renforcés par l’indissolubilité du mariage qui est traduite, en kinande, par amatsira malwayo, c’est-à-dire le refus ou le renoncement à quitter (son toit conjugal). Cette vision de l’indissolubilité du mariage était déjà exprimée dans les chants (amatakiyo) qu’exécutaient les jeunes filles le du jour des nonces pour féliciter le jeune couple. Le contenu de ces chants était des souhaits de stabilité du foyer, de paix, de prospérité, de fécondité du nouveau couple, thèmes que les parents

L’expression imagée, uhande omutima nga muko, évoque le caractère à savoir supporter les difficultés, jusqu’au bout, à la manière d’une spatule qui supporte la chaleur de l’eau bouillante quand on pétrit la pâte de manioc, de blé ou d’éleusines. Elle implique l’irréversibilité du mariage, et la fidélité qu’on rencontre dans la formule liturgique du mariage qui est devenue courante dans les conversations quotidiennes : « unis dans le meilleur comme dans le pire ».

Cet aspect est enfin renforcée par la formule liturgique et biblique, que personne ne sépare ce que Dieu a uni, car homme et femme deviennent un seul corps (Mt, 19, 5-6). Cette recommandation est toujours comprise comme une ratification de la dot qui scelle l’alliance entre les deux familles qui contactent le mariage après avoir estimé la possibilité de la coexistence des esprits des ancêtres de l’un et de l’autre.

Tel fut aussi le sens et le but du sacrifice offert à Dieu et aux ancêtres le jour de l’installation de l’épouse au foyer quand les parents leur demandaient la bénédiction pour leur fils et leur belle-fille. Cette bénédiction se manifeste dans la stabilité, et l’harmonie du foyer. Cette supplication ressort aussi dans la prière de la bénédiction nuptiale récitée par le prêtre :

‘«Dieu tout puissant, tu as créé toutes choses et dès le commencement ordonné l’univers ; en faisant l’homme et la femme à ton image, tu as voulu que la femme demeure pour l’homme une compagne inséparable et qu’ils soient désormais plus qu’un, nous signifiant ainsi de ne jamais rompre l’unité qu’il t’avais plu de créer. Regarde cette nouvelle épouse qui demande pour elle-même tous les biens de ta bénédiction: qu’elle ne soit que paix et tendresse ; qu’elle se conduise comme les saintes femmes dont parle l’Écriture ; que son époux lui donne sa confiance : en reconnaissant qu’elle est son égale, et qu’elle hérite avec lui de la grâce de vie, qu’il la respecte et l’aime toujours comme le Christ a aimé son Église.’ ‘Seigneur, nous t’en prions : donne à ces nouveaux époux d’être fermes dans la foi et d’aimer tes commandements ; qu’ils se gardent fidèles l’un à l’autre et que leur vie soit belle aux yeux de tous ; que la puissance de l’Évangile les rendent forts et qu’ils soient parmi les hommes de vrais témoins du Christ. Que leur union soit féconde, qu’ils se conduisent en parents justes et bons, et que tous deux aient la joie de voir les enfants de leurs enfants ; enfin, après avoir vécu longtemps heureux, qu’ils parviennent au bonheur des saints dans le Royaume des cieux.’ ‘Que le Seigneur votre Dieu vous garde unis dans un même amour et fasse grandir encore cet amour venu de lui. Que vos enfants soient la bénédiction de votre foyer et vous rendent sans mesure la joie que vous leur donnerez. Que la paix du Christ habite en votre maison et qu’elle règne toujours en vous. Que votre travail à tous deux soit béni, sans que les soucis vous accablent, sans que le bonheur vous égare loin de Dieu. Que de vrais amis se tiennent à vos côtés pour partager vos joies et vousaider dans la peine. Que tout homme en difficulté trouve auprès de vous soutien et réconfort. Que votre foyer soit un exemple pour les autres et qu’il réponde aux appels de vos frères. Que le Seigneur vous guide tout au long de votre vie 1639 ».’

Cette prière de bénédiction en relation avec la culture nande se présente comme une récapitulation des éléments des rites d’initiation qui culminent dans le mariage. La vie ancestrale qui peut être représentée comme le “bonheur des saints”. Selon l’enquête de Palermo Savino, un Père du Sacré-Cœur de Jésus, qui fut missionnaire à Kisangani (Stanley-Falls) dans la Province Orientale, les gens qui se présentent au mariage ne recherchent que cette bénédiction divine qui est une forme de récupération des instructions et de la bénédiction familiale pour le nouveau couple 1640 .

En effet, les instructions sur le mariage chrétien se réfèrent sur certains points essentiels aux aspirations de la personne. L’union légitime entre un homme et une femme, l’unité exclusive et monogamique, l’indissolubilité ou l’engagement à la fidélité pour toute la vie, la procréation et l’épanouissement des époux constituent la clef des enseignements religieux sur le mariage.

Ces principes religieux comportent des devoirs réciproques entre les époux chrétiens. Il s’agit notamment de la communauté de vie, de l’amour fidèle, de l’assistance mutuelle, l’entraide morale et matérielle, et de l’éducation des enfants. Ces aspects rejoignent et prolongent, dans la culture nande, les conseils reçus lors de l’initiation féminine ou masculine. C’est alors que pouvons adhérer à l’enquête du Père Savino Palermo quand il conclut que : « La célébration liturgique à l’Église n’est à leurs yeux qu’une bénédiction accordée par Dieu 1641  ».

Dans nos enquêtes auprès des fiancés, nous avons posé la question « pourquoi vous choissez-vous en mariage ? ». La réponse la plus spontanée est que Dieu l’a voulu. Elle implique, en même temps, que c’est Dieu qui a voulu que tel avec telle fondent un foyer chrétien. En dehors de cette question piégée, il faut comprendre l’influence du milieu, et le fait que le mariage religieux à l’Église catholique, à cause de son indissolubilité et par conséquent à cause de l’intervention du curé et de ses catéchistes, en cas d’un divorce prévisible, devient une garantie sociale pour les fiancées et pour l’engagement durable pour toute la vie 1642 .

L’image contient peut-être : 2 personnes, plein air et nature

 

Les trois dimensions personnelle, communautaire ou sociale, et divine des rites et, d’une manière particulière, celui du mariage traditionnel y figurent 1643 . L’élément enrichissant provenant du christianisme demeure celui de la foi en rapport avec l’Évangile. Ce rapport transforme et réoriente la relation avec Dieu et les ancêtres dans les sacrifices. En réalité, il y a trois célébrations du mariage : auprès de la coutume, de l’administration de l’État, et du curé. Les conseils répétitifs reçus de ces derniers pendant une demi-heure n’équivalent pas à ceux donnés par la famille et surtout la tante paternelle.

Remplir les fichiers de l’État et les registres du prêtre sont des occasions, pour les fiancés, d’organiser matériellement et spirituellement leur vie de foyer, loin du regard familial, et sans témoin 1644 . Le véritable mariage a été célébré dans la tradition quand la famille de la fiancée prépare la nourriture pour sa belle famille (erisima/remercier). Ce repas marque le consentement des deux familles, bien qu’elles ne soient réunies ensemble, pour offrir les fils et filles en mariage mais aussi leur alliance matrimoniale.

Le triple mariage d’un seul couple est devenu onéreux depuis les années 1980 parce ce qu’il implique trois fêtes qui se prolongent pour les catholiques par le rite ovulionyama, prolongation de la fête de mariage que la nouvelle épouse célèbre dans sa propre famille sans son époux. Cette nouvelle épouse est accompagnée d’un membre de sa famille et d’un autre provenant de la famille de son époux.

Le coût des festivités autour du mariage a fait que les familles, moins nanties, préfèrent célébrer le mariage traditionnel des fiancés, et tolèrent leur cohabitation avant leur mariage religieux ou civil. Cette situation entraîne une sanction juridique contre leurs parents et des concubins. Ils ne peuvent pas communier lors de la messe car « ils entretiennent le paganisme », ou alors ce sont des irréguliers du point de vue catholique.

Il faudra attendre l’année jubilaire pour régulariser ces situations religieuses. En 2000, sur 32 avenues, dans la ville de Butembo uniquement, il y a eu dans une unique célébration, lors de la célébration de la veillée pascale 40 célébrations de mariage dont ces couples avaient des enfants non encore à l’âge de scolarisation. Le facteur qui entraîna ce phénomène fut la décision romaine d’accompagner l’année 2000 des indulgences. La vie chrétienne dépend-t-elle de la pauvreté, de l’indulgence papale ou d’une condition sociale quelque peu réussie qui fait prévaloir la richesse ?

Du point de vue des chrétiens, l’apport moderne du consentement matrimonial devant les agents de l’État pousse certains, en particulier, les agents de l’Administration, à ne plus contracter un mariage religieux. Le mariage civil prend aussi des formes de concubinage (erihwekya) quand des hommes parviennent à inscrire leurs amies dans leurs livrets d’identité, et de polygamie temporaire quand ils sont éloignés de leur toit conjugal 1645 .

Par ailleurs, un autre produit de l’évolution des mentalités réside dans le processus du mariage. Le consentement au mariage est devenu en quelque sorte libre et personnel. Traditionnellement, les parents de deux familles en bonne entente pouvaient marier leurs fils et leurs filles sans les consulter ni recevoir leurs consentements. Depuis les années 1970, ces parents sont souvent mis devant le fait accompli. Même la dot qui était une contribution de la famille du jeune homme est devenue presque une affaire individuelle du concerné. En dépit de ces faits, ces nouveaux mariages n’échappent pas à la sollicitude des parents et à la vie selon la tradition ancestrale.

La négation du culte des ancêtres était pour les chrétiens un refus de l’initiation masculine (olusumba). Ses étapes 1646 consistaient dans les rites d’ouverture (erivutalo) constitués d’une offrande d’une poule aux divinités et aux ancêtres, d’un sacrifice d’un bélier noir, de la malédiction du sorcier, de la jaunisse, et de la paralysie dans les camps de réclusion, les masques et les statuettes du mukumo, et l’interrogatoire énigmatique. Elles ont presque disparu.

L’étape même de la circoncision rituelle (erivania) est réduite à une intervention chirurgicale dans un hôpital, un dispensaire, une maternité, ou à la maison par un infirmier ou une infirmières. Le secret et le mystère autour n’existent plus, ainsi que les neuf épreuves qui véhiculaient des instructions sur des types de rapports sociaux et éveillaient à l’intelligence pratique. !

La disparition des éléments culturels est due au christianisme qui ne peut concilier sa doctrine et sa morale avec les aspects de sacrifice aux ancêtres et la crainte du sorcier qui jalonnent les rites du cycle vital de l’homme. Par ailleurs, la vie citadine fait que la population locale n’habite plus à proximité des champs, et l’encadrement médical des femmes enceintes dans les maternités a contribué à l’abandon des pratiques du rite de la procession du panier.

Dans l’initiation masculine, à ces facteurs s’ajoutent le manque d’initiateurs, l’éloignement de la forêt pour la réclusion, et les exigences de la vie scolaire qui ne peut tolérer une absence de plus trois mois. Outre l’action des missionnaires, l’accès aux hôpitaux et aux dispensaires incite certaines personnes à ne plus se référer aux initiateurs (kipite), d’autres, pour épargner la douleur à leurs fils, préfèrent faire circoncire leur enfant à la sortie de la maternité, une semaine ou dix jours après sa naissance 1647 .

D’une manière générale, les vacances scolaires sont devenues le temps approprié pour les enfants dont l’âge varie entre six ou huit ans. À cause du secret lié à l’initiation masculine, les expatriés ignorent le type d’éducation que les jeunes recevaient durant leur période de réclusion dans la forêt. Malgré la disparition systématique de la circoncision pour un groupe d’enfants dans une région, certains éléments traditionnels demeurent : l’esprit de force pour affronter les difficultés, la prise de conscience de la vie future d’un adulte, l’éducation à la sagesse et à l’intelligence pratique.

Du point de vue social, l’esprit le sens de la solidarité (ovuwatikania), de la donation de soi et de l’effort, l’éducation à la vie communautaire, à la discrétion et à l’esprit d’écoute, le souci de recourir à un sage et d’être solidaire des malheurs et des joies des autres, la maîtrise de soi et le respect de la femme ainsi des anciens et des ancêtres sont, parmi tant d’autres, des aspects que les parents apprennent à leurs fils 1648 .

Notes

Source : Le déclin des Baghole globethics.net

theses.univ-lyon2.fr

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