Toujours pas de carte d'identité nationale en RD Congo !
Le 26/11/2019
Quel est le document que le Rd Congolais brandit comme carte d'identité? C'est la carte de service pour les employés, le permis de conduire pour les automobilistes, la carte d'étudiant pour les étudiants, la carte d'élève pour les élèves et le passeport pour ceux qui effectuent des voyages en dehors du pays. Bref, à chacun sa carte d'identité selon son statut social.
Cependant, le seul document commun à tous les Congolais majeurs reste la carte d'électeur. Moralité, vingt ans après la chute du régime de feu le maréchal Mobutu en mai 1997, il n'existe pas encore de carte d'identité pour citoyen congolais. }} A priori, cette triste réalité remet en scelle, la problématique du contrôle administratif des mouvements des populations aux frontières.
Qui est Congolais et qui ne l'est pas?
Le débat ici va au-delà de la sempiternelle polémique sur la nationalité. Bien au contraire. Le problème est davantage administratif. D'où, tout son intérêt à la fois pratique et national. Qu'est-ce qui explique cet état des lieux ? A quelle structure revient la responsabilité d''imprimer la carte d'identité nationale en RD Congo ?
LES AVANTAGES
A l'heure où les débats sur le nouveau passeport biométrique alimentent les débats aussi bien au niveau du Parlement que dans les rues de Kinshasa, il est tout de même curieux de constater que très peu de Congolais font cas à la carte d'identité. Pourtant, l'absence de ce document est généralement source de malentendus et même de conflits lors des contrôles policiers diurnes et nocturnes. Chaque fois que les agents de l'ordre demandent à toute personne interpellée de se présenter, le scénario ressemble quelque peu à la scène du " bouc et l'Anglais ", du célèbre écrivain et fabuliste français Jean de la Fontaine. On sait comment ça se termine. Vingt ans après le changement de régime politique au pays, il est inacceptable qu'il n'y ait toujours pas de carte d'identité en RD Congo. Pourtant, ce document constitue une source de données pour l'administration. Spécialement en ce qui concerne les statistiques de la population active en RD Congo. Car, les dernières remontent en 1984. Ce qui est anormal! Et dire que les dirigeants du pays n'ignorent pas cette réalité. La preuve, lors des processus électoraux de 2006 et 2011, il était repris sur la carte d'électeur, la mention suivante : " Cette carte tient lieu de carte d'identité provisoire." le caractère contraignant de cet avertissement a fait que le Congolais majeur de l'époque s'était senti dans l'obligation d'obtenir sa carte d'électeur pour compenser l'absence de la carte d'identité. Cependant, la validité d'un document administratif n'étant pas intemporelle, il s'était posé la légitime et pertinente question sur ce qui allait advenir dans la suite. C'est-à-dire après les élections.
Quand est-ce que la carte d'électeur devrait cesser de servir de carte d'identité momentanée en RD Congo ?
A cette question, l'actuelle carte d'électeur semble avoir déjà répondu. Car, elle ne reprend plus la fameuse phrase " cette carte d'électeur tient lieu de la carte d'identité provisoire". Partant, on ne devrait plus, logiquement, exiger cette même carte lors des formalités de n'importe quelle transaction. Hélas ! S'agit-il d'un oubli involontaire de la part du concepteur de la carte d'électeur actuelle en RD Congo? Pas du tout. Il y a quelques semaines, un responsable de la Centrale électorale congolaise, interrogée sur cette question par notre consœur Top Congo Fm, avait déclaré qu'il n'appartient pas à la Ceni d'émettre la Carte d'identité. " Cette prérogative est de l'Office national d'identification de la population (ONIP) ", avait-il déclaré. Au fait, la radio Top Congo Fm s'était fait l'écho d'une préoccupation des Kinois sur le port de la carte d'électeur. La question consistait à savoir si le fait, pour un Congolais, de ne pas se munir de sa carte d'électeur, constituait ou pas une infraction.
A ce souci des Kinois, la réponse de l'homme de la Ceni était sans équivoque. " Non ", avait-il rétorqué, précisant que l'aspect pénal n'apparait que si la personne est surprise en flagrant délit de falsification de ladite carte pour des fins électorales. Sur base de cette clarification de la Ceni, on ne devrait donc plus exiger la carte d'électeur comme identité du Congolais. Malheureusement, il se fait que l'Onip à qui incombe la responsabilité d'émettre la nouvelle carte d'identité en RD Congo, fait l'ombre de lui-même depuis sa création en 2016. D'ailleurs, plus de la moitié de la population du pays ignorent que cette structure existe.
UNE SOURCE SURE DE RECETTES
Au-delà de sa fonction administrative de contrôle des populations, la carte d'identité constitue une source s$re de recettes. A l'hypothèse que la population actuelle de la RD Congo soit de plus 80 millions d'habitants. Cela suppose qu'on aurait également 80 millions de cartes d'identité à imprimer et à vendre. Et, si le document peut coûter au minimum un dollar américain, les calculs sont alors bien simples. C'est que 80 millions USD entreront dans les caisses de l'Etat. Et, ce n'est pas modique, dans un pays comme la RD Congo dont le budget avoisine 5 milliards de dollars américains. Alors, plutôt que de focaliser les débats sur le passeport biométrique qui, à la limite, ne pourrait concerner que le cinquième de la population congolaise, les dirigeants du pays, à quelque échelle de responsabilité, devraient «aussi» s'intéresser à la Carte d'identité.
Laurel KANKOLE